Écrevisse à taches rouges (Orconectes rusticus)
Statut
Espèce envahissante préoccupante, aux portes du Québec.
Description
Les écrevisses appartiennent à une classe de crustacés pour laquelle il est difficile de distinguer les différentes espèces. Quelques caractères distinctifs permettent cependant de distinguer l’écrevisse à taches rouges (Orconectes rusticus ou écrevisse américaine) des autres espèces. La couleur de sa carapace peut varier entre le gris-bleu et le brun-vert foncé, mais il est presque toujours possible de relever une tache de couleur rouge rouille de chaque côté de sa carapace. Dans certains cours d’eau, il arrive cependant que ces taches rouges soient absentes ou effacées. La présence de bandes noires à l’extrémité de ses pinces permet aussi de la reconnaître. Les experts se servent finalement de la configuration des organes reproducteurs pour l’identifier.

©Minnesota Sea Grant
Schéma d’une écrevisse à taches rouges présentant les principaux caractères distinctifs pour la reconnaître.
Espèces similaires
L’écrevisse à taches rouges peut être confondue avec l’écrevisse à pinces bleues (Orconectes virilis), l’écrevisse à rostre caréné (Orconectes propinquus) et l’écrevisse marbrée (Orconectes immunis) que l’on trouve également au Québec. Les deux premières sont indigènes et la marbrée a aussi été introduite, mais l’écrevisse à taches rouges a une taille supérieure à celle de ses congénères. Elle mesure en moyenne 10 cm, sans compter les pinces qui sont particulièrement robustes par rapport à l’écrevisse à pinces bleues et l’écrevisse marbrée. Bien que ce soit plus difficile à observer, les espèces présentent des différences au regard de leurs organes reproducteurs, mais la présence des pointes noires aux extrémités des pinces demeure un moyen de distinguer cette espèce des autres.
Habitat
L’écrevisse à taches rouges est un crustacé d’eau douce qui fréquente les lacs, les rivières, les étangs et les ruisseaux. Elle ne construit pas de terriers, mais elle se réfugie dans les interstices des roches ou des débris qui tapissent les fonds où elle préfère évoluer. En Ontario, les lacs à fond rocheux du Bouclier canadien où elle a été introduite correspondent ainsi à son habitat de prédilection. Elle peut cependant fréquenter les substrats comme le sable, l’argile, le limon ou encore les zones envahies de plantes aquatiques. Dans les cours d’eau, elle s’adapte autant dans les zones de faible ou de fort courant, mais une condition essentielle pour son maintien est une qualité d’eau convenable tout au long de l’année.
Reproduction
L’écrevisse à taches rouges se reproduit au printemps et au début de l’automne. Elle atteint la maturité sexuelle lorsqu’elle mesure environ 3,5 cm, ce qui se produit généralement entre la première et la deuxième année de vie. Pendant l’accouplement, le mâle saisit la femelle et maintient fermement ses pinces avec les siennes. Il presse ses gonopodes (organes ou stylets copulateurs) contre le gonopore (orifice génital) de la femelle et libère ses spermatozoïdes qui s’écoulent le long des stylets avant d’atteindre les gonopores. Quelques semaines plus tard, la femelle pond de 80 à 600 œufs et les protège sous son abdomen. Après l’éclosion, soit environ deux semaines plus tard, les larves restent accrochées à la femelle jusqu’à leur seconde mue avant de quitter définitivement la mère.
Historique d’introduction et vecteur d’introduction et de propagation

©Doug Watkinson,
ministère des Pêches et des Océans de l’Ontario
Originaire de l’Ohio, l’écrevisse à taches rouges est une espèce vorace qui a entraîné la disparition de certaines plantes dans les lacs qu’elle a envahis.
Contrairement aux moules zébrées (Dreissena polymorpha) et quagga (Dreissena bugensis), au gobie à taches noires (Neogobius melanostomus) et à la crevette rouge sang (Hemimysis anomala) qui proviennent tous du bassin Ponto-Caspien, l’écrevisse à taches rouges est un envahisseur qui provient des États-Unis, plus précisément du bassin versant de la rivière Ohio.
La première mention d’écrevisse à taches rouges au Québec a été rapportée au début des années 2000. Le vecteur par lequel l’écrevisse à taches rouges est venue coloniser les eaux québécoises est inconnu, mais il est possible qu’elle se soit propagée par des seaux de poissons appâts vidés par des pêcheurs sportifs, ou encore par l’eau des aquariums vidés dans les milieux naturels par des aquariophiles.
Distribution connue
Utilisée comme appât vivant par les pêcheurs sportifs, l’écrevisse à taches rouges se répand dans de nouveaux cours d’eau depuis ses premières mentions en Ontario, dans les lacs Kawartha, au début des années 60. Depuis, l’écrevisse à taches rouges s’est établie dans plusieurs régions du sud et du nord-ouest de la province de l’Ontario. Jusqu’au début des années 2000, la présence au Québec de l’écrevisse à taches rouges n’était connue qu’en quelques stations dans la région de l’Outaouais. Aujourd’hui, non seulement la liste des mentions s’est allongée dans cette région (bassin des rivières Blanche et Gatineau), mais des captures se sont ajoutées dans la partie québécoise supérieure de la rivière aux Brochets en Montérégie, entre la frontière et Frelighsburg, ainsi qu’à Standbrige East.
Impacts de son introduction
L’écrevisse à taches rouges est plus agressive que les espèces d’écrevisses indigènes. Dans tous les endroits où elle s’est établie, elle a complètement éliminé les écrevisses indigènes et perturbé l’équilibre des écosystèmes aquatiques. Par exemple, dans le nord de l’Ontario, elle a déplacé deux espèces d’écrevisses que l’on trouve aussi au Québec, l’écrevisse à pinces bleues et l’écrevisse à rostre caréné. Il y a par ailleurs possibilité d’hybridation entre l’écrevisse à taches rouges et celle à rostre caréné, dont les descendants peuvent aussi menacer les espèces natives.
Étant donné que les femelles portent les œufs sur elles, le relâchement d’une seule d’entre elles dans un milieu propice peut engendrer une nouvelle population. C’est pour cette raison qu’il ne faut jamais vider les seaux de poissons appâts dans un plan d’eau.
Enfin, l’écrevisse à taches rouges est un animal très vorace qui peut affecter l’industrie de la pêche en diminuant l’abondance des plantes aquatiques dont elle se nourrit et en détruisant ainsi l’habitat d’autres invertébrés ou les refuges pour des poissons. Elle réduit aussi la diversité des espèces en s’alimentant d’escargots, de palourdes, de sangsues, d’insectes aquatiques, d’autres crustacés et enfin, d’œufs de poissons. Elle a donc un impact sur les populations de poissons puisqu’elle diminue les ressources alimentaires dont ils ont besoin pour leur survie.
Prévention et contrôle
La détection rapide des populations isolées peut aider à ralentir ou à réduire l’envahissement des écrevisses à taches rouges.
Vous pouvez contribuer à prévenir l’envahissement de cette espèce nuisible en appliquant les méthodes de prévention et de contrôle qui s’imposent pendant les activités de pêche et de loisir.
Information complémentaire