Nasse de la Nouvelle-Zélande (Potamopyrgus antipodarum)

Statut de l’espèce

Espèce exotique préoccupante aux portes du Québec.

Description

Nasse de la Nouvelle-Zélande.
© Dan Gustafson.

La nasse de la Nouvelle-Zélande est un escargot d’eau douce qui possède une coquille de forme allongée. L’hélice, formée de cinq à sept tours, s’enroule vers la droite. Chaque tour est séparé par une profonde fissure. Le modèle morphologique de cette coquille est cependant très variable : elle sera plus allongée chez certains spécimens et plus ronde chez d’autres. De plus, elle peut être munie ou non d’une quille, bande convexe passant au centre de chaque tour de coquille. La quille peut être ornée d’épines brunes. La membrane recouvrant la coquille du mollusque peut être gris clair ou brun foncé. En Amérique du Nord, la longueur moyenne de la nasse de la Nouvelle-Zélande est d’environ 5 mm, alors qu’elle peut atteindre 11 mm dans son pays d’origine.

Espèces similaires

La classification des espèces du genre Potamopyrgus change constamment. Il y a encore aujourd’hui des controverses concernant l’identification de la nasse de la Nouvelle-Zélande. Parmi les espèces similaires, on a identifié P. pupoides et P. estuarinus, deux espèces ovipares vivant en eau saumâtre, dont la coquille ne possède aucun ornement. Des espèces comme P. cresswelli et P. subterraneus ont récemment été différenciées de la nasse de la Nouvelle-Zélande. Il est très ardu de différencier les espèces d’escargots. Leurs caractéristiques spécifiques sont très difficiles à observer, c’est pourquoi il faut faire appel à un expert pour identifier un spécimen.

Habitat

Dans son aire de répartition naturelle, la nasse de la Nouvelle-Zélande est une espèce d’eau douce. On la trouve dans les rivières, les étangs, les marais, les ruisseaux et même dans les estuaires. Dans les régions où elle a été introduite, elle occupe également ces habitats, en plus de fréquenter des milieux aquatiques artificiels comme les réservoirs, les canaux ou encore les bassins d’eaux minières. La nasse de la Nouvelle-Zélande est principalement une espèce littorale, mais peut aussi survivre à des profondeurs allant jusqu’à 25 m, comme les individus observés dans le lac Ontario. Les principaux substrats utilisés par cette espèce envahissante sont l’argile, le sable fin, la boue, le béton, les cailloux et les grosses algues, dont elle se nourrit. Durant une période de sécheresse, elle peut s’enfouir dans des substrats mous et ainsi limiter sa déshydratation.

La nasse de la Nouvelle-Zélande possède une grande capacité à résister à de fortes variations environnementales. L’adulte peut proliférer à une salinité variant de 0,01 à 2,5 %. Cependant, sa survie, sa fécondité et sa résistance thermique sont optimisées lorsque la salinité est inférieure ou équivalant à 0,5 %. Par comparaison, la salinité de l’eau de mer est d’environ 4 %. Cette espèce peut tolérer des températures situées près de 0 °C et jusqu’à 31 °C, selon la concentration de l’eau en calcium et en sels. Elle ne survit pas en dessous de 0 °C.

Reproduction et croissance

Illustration d’une coquille de nasse de la Nouvelle-Zélande. Contrairement au spécimen de droite, le spécimen de gauche possède une quille ornée d’épines. ©Susan Trammell, U.S. Geological Survey

La nasse de la Nouvelle-Zélande comporte des individus mâles et femelles. Aucun individu ne possède les deux sexes. Dans son aire de répartition naturelle, la proportion de mâles peut atteindre les 30 %, mais elle ne dépasse habituellement pas 3 %. Dans les aires d’introduction, elle se reproduit majoritairement par parthénogenèse, soit la multiplication à partir d’un œuf non fécondé par un mâle. La femelle produit ainsi, au printemps ou à l’été, des œufs qui se développeront et écloront dans une poche incubatrice. Une femelle dont la poche incubatrice est remplie d’œufs et de juvéniles représente un plus grand potentiel d’envahissement. Après environ trois mois de croissance, la femelle est mature et sa coquille a atteint une longueur de 2,75 mm à 3,50 mm. Une portée compte de 20 à 120 juvéniles et chaque femelle peut produire jusqu’à 230 rejetons par année. Il peut y avoir jusqu’à six générations par année. Cette grande fécondité peut provoquer une explosion de la taille de la population. Par exemple, lors de l’introduction de la nasse de la Nouvelle-Zélande dans le lac Zurich, en Suisse, la population a atteint une densité de 800 000 individus par mètre carré en seulement 7 ans.

Historique de l’introduction et principaux vecteurs de propagation

Cartes illustrant la propagation de la nasse de la Nouvelle-Zélande de 1987 à aujourd’hui. @ Thomas Therriault

La nasse de la Nouvelle-Zélande a été introduite dans plus de 30 pays sur 4 continents. Elle a été vue pour la première fois en Amérique du Nord en 1987 dans la rivière Snake, aux États-Unis. Elle se serait par la suite propagée dans le fleuve Columbia où elle a été aperçue en 1996. Tous les États de l’Ouest américain, à l’exception du Nouveau-Mexique, sont maintenant colonisés par la nasse de la Nouvelle-Zélande. En 1991, elle a été découverte dans le lac Ontario et elle est maintenant établie dans une petite partie du fleuve Saint-Laurent située en amont. On l’a trouvée subséquemment dans les lacs Érié, Supérieur et Michigan ainsi que dans des affluents du lac Ontario. Il est à noter que les conditions climatiques et la température enregistrées au lac Supérieur pourraient limiter l’établissement de la nasse de la Nouvelle-Zélande. Par contre, les changements climatiques devraient augmenter le potentiel invasif de la nasse de la Nouvelle-Zélande en augmentant la température des lacs et des rivières. En 2006, la nasse de la Nouvelle-Zélande a été observée pour la première fois en Colombie-Britannique.

Le principal vecteur d’introduction de la nasse de la Nouvelle-Zélande dans l’Ouest américain serait probablement les produits d’aquaculture commerciaux, comme les œufs de truites ou les poissons vivants. Dans la région des Grands Lacs, par contre, l’espèce aurait été introduite par les eaux de ballast des navires commerciaux.

L’invasion secondaire serait pour sa part assurée par une trentaine de vecteurs. Parmi ceux-ci, on compte la libération volontaire, la dispersion naturelle (mouvements volontaires, dérive naturelle, inondations), la fixation à des organismes aquatiques ou terrestres et aux équipements de pêche récréative, ainsi que le transport dans les voies gastro-intestinales de certains oiseaux ou poissons.

Distribution connue

La nasse de la Nouvelle-Zélande est établie sur quatre continents et sa distribution actuelle en Amérique du Nord est indiquée sur la carte E. On observe des foyers de propagation dans l’Ouest américain, dans la région de la rivière Snake et celle du fleuve Columbia. À l’est, on trouve des populations dans les lacs Supérieur, Michigan, Érié et Ontario et en amont du fleuve Saint-Laurent.

Impacts de son introduction

Les impacts négatifs engendrés par la présence de la nasse de la Nouvelle-Zélande sont liés à sa grande fécondité. En Australie, on a déjà observé des densités allant jusqu’à 50 000 escargots/m2. Aux États-Unis, des densités record de 500 000 escargots/m2 ont été recensées. Dans les zones où elle a été introduite, cette espèce se livre à une intense compétition pour le territoire et les ressources alimentaires avec les invertébrés indigènes. Son succès invasif est assuré par sa fécondité élevée, sa reproduction par parthénogenèse, son faible taux de prédation et sa tolérance à des conditions environnementales variées (salinité, température). La nasse de la Nouvelle-Zélande peut représenter jusqu’à 97 % de la biomasse d’invertébrés dans un milieu d’introduction.

Prévention et contrôle

Lorsque la nasse de la Nouvelle-Zélande est établie dans un milieu, il est pratiquement impossible de l’éradiquer. Pour cette raison, les pêcheurs, les chasseurs, les aquaculteurs et les plaisanciers doivent être informés sur les vecteurs de propagation et les conséquences de l’introduction de cette espèce dans un nouveau milieu.

Plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour éliminer la nasse de la Nouvelle-Zélande des embarcations et des équipements d’activités aquatiques. Par exemple, un séchage prolongé de 24 heures à 30 °C ou de 2 heures à 40 °C s’avère efficace pour l’éliminer. L’immersion de l’équipement dans de l’eau à 50 °C ou plus et la congélation sont aussi des méthodes valables. Le nettoyage de l’embarcation est aussi très important.

Dans les aires de répartition isolées comme les petits lacs, les étangs et les canaux d’irrigation, il est possible d’éradiquer la nasse de la Nouvelle-Zélande à l’aide de méthodes physiques. Le drainage des eaux, qui permet d’assécher le substrat, s’avère efficace. Dans les écloseries, l’utilisation d’un lance-flamme dans les canalisations préalablement vidées a aussi porté ses fruits.