Amélioration génétique des arbres
Note : Le numéro qui apparaît entre parenthèses correspond à celui de l'activité de diffusion scientifique dont la liste se trouve dans la section Publications de 2013-2014.
L’acquisition de connaissances relatives à la variabilité génétique des espèces forestières commerciales est utile pour sélectionner des variétés destinées au reboisement en fonction d’objectifs spécifiques. Les variétés sont choisies pour accroître le volume, la qualité ou la valeur des bois produits en plantation, avec le souci de maintenir une diversité élevée. La plantation de variétés productives sur des superficies restreintes, à proximité des usines, contribue à diminuer la pression exercée sur la forêt naturelle. Il sera également possible de sélectionner des variétés mieux adaptées aux conditions climatiques locales prévues pour les décennies à venir, et potentiellement plus productives que les populations actuelles. Les connaissances acquises facilitent la mise en place des mesures adéquates de conservation in situ ou ex situ des ressources génétiques forestières.
Au cours de l’année 2013-2014, les travaux relatifs à l’amélioration génétique ainsi qu’à la problématique des changements climatiques ont permis des réalisations concrètes et des avancées dans l’acquisition de connaissances concernant les sujets suivants :
Épinette blanche
- Trois plantations expérimentales d’épinette blanche impliquant le déplacement des sources de semences (vergers à graines) dans une grande amplitude de conditions environnementales, selon un gradient sud-nord, ont été établies dans l’est du Québec. Ce dispositif sera complété en 2014 et en 2015 par l’ajout de 6 autres plantations dans le centre et l’ouest du Québec. L’objectif de ce dispositif est de déterminer l’effet des changements climatiques sur la croissance et la phénologie des arbres de différentes sources, tout en mesurant les gains réels de productivité associés à la plantation de matériel amélioré. Les mesures prises permettront également de vérifier la validité du nouveau modèle de transfert mis au point récemment, et d’évaluer l’effet de l’environnement sur la phénologie (débourrement, aoûtement, croissance, floraison) des différentes sources de semences. Cette expérimentation est réalisée en collaboration avec l’équipe de production de semences et de plants de la DRF et l’Université Laval.
- Maintenant que les arbres composant les tests génétiques ont atteint un âge suffisant pour qu’on y prélève des carottes de bois (de 15 à 20 ans), les améliorateurs travaillent à mettre au point de nouvelles méthodes d’évaluation rapides et non destructives de la qualité du bois. Par exemple, avec l’épinette blanche, l’appareil Hitman ST300 mesure la vitesse de circulation d’une onde acoustique. Celle-ci étant fortement corrélée avec les mesures d’angle des microfibrilles et de rigidité (module d’élasticité), nous pourrons établir rapidement un classement relatif des arbres pour ces deux caractères.
Épinette de Norvège
- Les plus récents résultats des tests génétiques confirment que plusieurs sources d’épinette de Norvège sont bien adaptées aux conditions bioclimatiques du sous-domaine de la sapinière à bouleau blanc de l’Ouest (124). Certaines d’entre elles offrent une croissance comparable à l’épinette blanche. Ces résultats serviront à diversifier les sources de semences recommandées pour ce sous-domaine.
- De plus, les recommandations de croisements biparentaux ont été mises à jour pour l’épinette de Norvège. En plus des gains en croissance, l’identification des meilleurs parents à croiser permet d’obtenir des descendants plus résistants au charançon du pin blanc. Ces arbres, reproduits par bouturage à la pépinière de Saint-Modeste, sont disponibles pour l’ensemble du Québec méridional ainsi que pour les sous-régions écologiques 4e-T et 5d-M du Saguenay – Lac-Saint-Jean.
Plantation d'épinette de Norvège âgée de 11 ans située près du réservoir Gouin,
dans le sous-domaine bioclimatique
de la sapinière à bouleau blanc de l'Ouest
(Photo : J. S. Joannette, MFFP). |
Épinette noire
- La production d’une 2e génération d’épinette noire génétiquement améliorée s’est poursuivie en 2013, à Duchesnay, avec la réalisation des croisements pour créer une nouvelle population destinée au domaine de la sapinière à bouleau jaune et au sous-domaine de la sapinière à bouleau blanc de l’Ouest. Il s’agit de la 3e population de 2e génération, qui intègre des arbres sélectionnés dans l’ensemble du domaine de la sapinière et le sud du Québec.
- Plusieurs études sur la génétique des propriétés du bois de l’épinette noire sont en cours d’analyse depuis 2012-2013. Une étude dans 4 tests de descendances uniparentaux a notamment démontré que l’évaluation acoustique in situ nous permet de sélectionner à la fois pour la croissance et l’élasticité dynamique du bois, sans affecter significativement la densité. En 2013, ces résultats ont été mis en application alors que des mesures semblables ont été prises dans 2 tests de clones de 15 ans, afin de sélectionner les clones les plus performants sur le plan de la croissance, tout en maintenant la qualité du bois produit. Les résultats d’une autre étude menée en collaboration avec l’Université Laval, portant cette fois sur la sélection génomique à l’aide de marqueurs des propriétés du bois dans 2 tests biparentaux âgés de 21 ans, est aussi en phase d’analyse. Les résultats préliminaires des mesures phénotypiques indiquent notamment que l’angle des microfibrilles, tout comme l’élasticité dynamique à laquelle cet angle est étroitement relié, serait aussi un caractère utile pour les sélections génétiques.
Évaluation acoustique de l'élasticité dynamique du bois dans un test clonal d'épinette noire de 15 ans en Gaspésie avec l'appareil Director® ST300
(Photo : M. Desponts, MFFP). |
Mélèze laricin
- Dans le but de répondre à la demande croissante de plants de mélèze laricin, un important test de descendances (3,5 ha – DAB61482) a été mesuré en fin de rotation, 31 ans après sa mise en terre à Dablon, au Lac-Saint-Jean. Une éclaircie génétique a été faite pour transformer ce test en verger à graines : les 800 meilleurs arbres serviront de semenciers et de population de base pour le prochain cycle d’amélioration du mélèze laricin dans l’est du Québec. Les descendants de ces 800 parents produiront en moyenne 12 dm3 de plus par tige (6 %) à 31 ans, soit un gain génétique prédit de 210 m3/ha pour des stations similaires à celles du test.
Mélèze laricin de 31 ans sélectionné lors d'une éclaircie
génétique à l'arboretum de Dablon
(Photo : G. Lapointe, MFFP). |
Peupliers hybrides
- Amélioration génétique : 4 tests de clones de peupliers hybrides ont été établis dans Bellechasse, dans la région du Bas-Saint-Laurent, à l’arboretum de Lotbinière et à la pépinière de Normandin. À ce dernier endroit, une collection canadienne de Populus balsamifera a aussi été mise en terre. À la pépinière de Trécesson, un nouveau quartier de pieds-mères a été établi avec les 228 nouvelles sélections de l’hybride M×B issues des croisements de 2004.
- La liste des clones recommandés de peupliers hybrides a été mise à jour avec l’ajout de nouvelles sélections dans différentes sous-régions écologiques. Ainsi, 5 nouveaux clones M×N, provenant de 4 familles différentes, se sont ajoutés à la liste pour les domaines bioclimatiques de l’érablière. Sept autres nouveaux clones représentant 4 hybrides différents – M×T, R×M, M×B, D×M, M×N – ont été recommandés pour les domaines de la sapinière.
- Cultures bioénergétiques : une plantation expérimentale de peupliers, établie en 2012 à Saint-Bruno d’Alma avec la collaboration de plusieurs partenaires financiers (Nutrinor, Agrinova, le Collège d’Alma et le CRSNG) et cultivée en taillis de courte rotation (TCR), a été mesurée à l’automne 2013 par la DRF avec la participation du Réseau Ligniculture Québec (RLQ); la biomasse a été récoltée par Agrinova. Les données recueillies montrent qu’en 2 saisons de croissance, la plantation a produit un rendement moyen en biomasse de 6,6 tonnes métriques anhydres à l’hectare.
Plantation de démonstration de peupliers hybrides
(clone 915318) âgée de 11 ans, à Saint-Denis de Matane (Photo : P. Périnet, MRN). |
Évaluation de peupliers hybrides dans un test de clones
de 4 ans, dans le Bas-Saint-Laurent
(Photo : P. Périnet, MRN).
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Pin gris
- Les croisements de pin gris effectués pour produire une population de 2e génération destinée au reboisement de l’ensemble du sous-domaine de la sapinière de l’Ouest ont été complétés en 2013. Il est prévu d’entreprendre la création d’une nouvelle génération pour le domaine de la pessière en 2014.
Conservation des ressources génétiques forestières arborescentes
Certains résultats de travaux en cours portant sur le statut de conservation des espèces forestières arborescentes du Québec ont servi dans une enquête menée à l’échelle canadienne sous l'égide de CONFORGEN. En 2013, les résultats ont été diffusés dans une publication sur l’État des ressources génétiques forestières au Canada.
Transfert, diffusion et collaborations diverses
Les chercheurs en amélioration génétique demeurent en constante communication et appuient leur interlocuteur privilégié, la DGPSPF. Cela se traduit par la recommandation de nouveaux individus ou de nouvelles variétés pour l’établissement des futurs vergers à graines et parcs de croisements, ou pour une utilisation directe dans le programme de reboisement (par exemple, de nouveaux clones d’épinette blanche issus d’embryogenèse somatique) afin de maximiser le rendement des plantations au Québec. À la demande de la DGPSPF, les chercheurs ont publié un avis technique sur l’état de la maladie du chancre septorien chez le peuplier hybride au Québec (125). La présentation des nouveaux modèles de transfert pour l’épinette blanche et l’épinette noire (202) à la DGPSPF et au Bureau du forestier en chef a mis la table pour une discussion sur l’élaboration de mesures d’adaptation aux changements climatiques dans les plantations faites au Québec. Finalement, l’expertise des chercheurs en matière de feuillus nobles a été mise à contribution dans le cadre du congrès annuel de la Garden Writers Association, en visite au Domaine Joly-de Lotbinière. L’historique de la plantation de noyers noirs, établie en 1882, ainsi que les principaux résultats de recherche, ont été présentés aux participants (184).
Les chercheurs ont également été sollicités à titre de conférenciers, entre autres pour une présentation à Charlottetown lors de la 13e conférence nord-américaine en agroforesterie (North American Agroforestry Conference, NAAC), tenue conjointement avec la réunion annuelle 2013 du Conseil du peuplier du Canada, du 19 au 23 juin 2013 (146), ainsi que dans le cadre des travaux du Groupe de travail sur l’acquisition de connaissances sur la rouille vésiculeuse du pin blanc dans les pépinières forestières (201). De même, des conférences ont été données auprès des pépiniéristes, les 3 et 4 décembre 2013 à la pépinière de Berthierville (185), dans le cadre l'Atelier-conférence Les semences forestières : un maillon clé des plantations de grande valeur. Des échanges fructueux ont porté sur les façons de tirer profit de connaissances de pointe en génomique forestière, la participation à l’élaboration d’outils de sélection rapide pour la qualité du bois, la mise au point des variétés qui seront mieux adaptées aux conditions résultant des changements climatiques et l’amélioration des conditions de conservation de la diversité génétique (166). L’intégration de l’embryogenèse somatique, qui permet de produire les variétés d’épinette blanche les plus performantes, dans ces différents domaines de recherche a également fait l’objet d’une présentation à la communauté forestière québécoise et canadienne (186).
Les chercheurs collaborent à des projets de recherche en réseau avec les universités, portant entre autres sur la caractérisation du bois et la sélection assistée par marqueurs moléculaires (33). Ils ont poursuivi leurs travaux entrepris à l’automne 2012 sur les caractères liés à la qualité du bois de l’épinette noire. Ils collaborent aussi en réseau avec des centres gouvernementaux comme le Service canadien des forêts, notamment dans le domaine de la culture des essences à croissance rapide.