Pleins feux sur… la chasse à la gélinotte huppée
Connais-tu l’expression « les perdrix bourgeonnent aux premières neiges »? Lorsque les arbres ont perdu leurs feuilles et que la première neige recouvre le sol, souvent nous nous regroupons pour manger les bourgeons dans la cime des arbres. Ouvre bien l’œil la prochaine fois que tu circuleras dans un sentier, surtout s’il y a des bouleaux jaunes (Betula alleghaniensis) ou des peupliers faux-trembles (Populus tremuloides), nos essences préférées!
La cousine de la perdrix
Mon nom scientifique est Bonasa umbellus. Bonasa veut dire « bon lorsque rôti » et umbellus, qui signifie ombrelle, désigne la collerette de plumes que le mâle porte sur le cou.
On me connaît surtout sous le nom de perdrix. Dans les régions de la Montérégie et des Laurentides, le terme perdrix fait également référence à la perdrix grise (Perdix perdix) et au tétras du Canada (Canachites canadensis). Par contre, dans la région du Nord-du-Québec, ce terme regroupe les lagopèdes et le tétras à queue fine (Tympanuchus phasianellus). C’est un peu mêlant n’est-ce pas? Que la véritable perdrix se lève…
Il s’agit en fait de la perdrix grise, une espèce originaire d’Eurasie et introduite au Québec vers 1940. Moi, je suis une gélinotte huppée. Nous sommes tous de la grande famille des phasianidés qui compte plus de 200 espèces, dont le faisan (Phasianus colchicus), le dindon sauvage (Meleagris gallopav) et la poule domestique (Gallus gallus domesticus). Mais je suis la seule du genre Bonasa en Amérique du Nord.
Pour augmenter tes chances de succès à la chasse, il faut d’abord bien me connaître. Laisse-moi donc te révéler quelques-uns de mes secrets, mais pas tous quand même!
D’un milieu à l’autre
Selon les étapes de ma vie, je vais occuper différents types de milieux. Pour la nidification, j’utilise principalement les forêts feuillues matures. Une fois les poussins éclos, je déménage tout le monde vers de jeunes forêts de feuillus très denses. J’ai besoin d’un couvert latéral dense pour protéger ma couvée des nombreux prédateurs : les oiseaux de proie, principalement l’autour des palombes (Accipiter gentilis), et les mammifères, tel le renard roux (Vulpes vulpes). Je passe l’hiver dans les forêts mixtes matures où les conifères me protègent du vent et du froid.
De leur côté, les mâles sont moins sélectifs, mais ils ont tout de même une exigence bien particulière. Ils recherchent un monticule de terre, un rocher ou, de préférence, un tronc d’arbre renversé pour tambouriner! Ils demeurent aux alentours de leur lieu de tambourinage toute l’année. As-tu déjà entendu un mâle s’exécuter? Écoute ! Ces performances ailées sont d’ailleurs utilisées par les biologistes pour obtenir une estimation de l’abondance des populations. Ceux-ci comptent le nombre de mâles tambourineurs le long d’un parcours d’écoute pour connaître la densité (nombre de gélinottes/km2) de gélinottes huppées dans un territoire donné. Un habitat moyen abrite de 5 à 50 oiseaux/km2.
Il y a donc quatre types d’habitat : l’habitat de tambourinage, de nidification, d’élevage des couvées et l’habitat hivernal. Tous ces différents milieux sont essentiels à ma survie. Les adultes vont demeurer dans le même secteur, mais les juvéniles vont se disperser aux alentours à l’automne. Je ne migre pas l’hiver venu, car je suis une espèce sédentaire.
Une espèce cyclique
Il ne faut pas t’étonner si certaines années semblent plus fructueuses que d’autres. Je serais une espèce cyclique, c’est-à-dire que, de façon récurrente, on observe dans certaines populations une diminution importante du nombre de gélinottes. Un peu comme à la bourse, les titres s’effondrent et c’est le crash! La longueur du cycle serait de 5 à 7 ans. C’est compliqué de comprendre ce phénomène des cycles, car il y a de nombreux éléments qui peuvent être considérés : les prédateurs, le climat, l’alimentation, la chasse, la qualité de mon habitat et le succès de reproduction. Les chercheurs devront se pencher sur la question pour élucider le mystère des fluctuations de mes populations. Je n’ai pas encore dévoilé tous mes secrets!
Populaire à la petite chasse
Je suis le petit gibier à plumes le plus recherché par les chasseurs et chasseuses du Québec. Hé oui, les gestionnaires de la faune ont fait de moi un « petit gibier ». Ce groupe comprend les « perdrix » (six espèces d’oiseaux), les lièvres (trois espèces), la bécasse d’Amérique (Scolopax minor) et la sauvagine. Connais-tu d’autres membres du groupe sélect des perdrix? Il y a la perdrix grise, le tétras du Canada, le tétras à queue fine, le lagopède alpin (Lagopus muta), le lagopède des saules (Lagopus lagopus) et moi, la gélinotte huppée.
Petit gibier, petite chasse… tout de même…. Comme le dit le proverbe : « Dans les petits pots, les meilleurs onguents ». Ma chair est délicieuse, et si tu as l’occasion d’y goûter, tu verras! Certes, je n’ai pas la taille d’un orignal (Alces alces) ou d’un ours noir (Ursus americanus), dit grand gibier, mais j’ai plus d’un tour dans mon sac. Je compte sur mon plumage cryptique pour te déjouer. À ton approche, je m’immobilise et je m’envole au dernier moment dans un bruissement d’ailes qui souvent te fera sursauter! Je suis douée pour les décollages rapides et les virages brusques dans les broussailles! Tu dois demeurer vigilant. Tu as le temps d’épauler ton arme, mais je suis déjà hors de ta vue. Quoi qu’on en dise ou qu’on en pense, cette petite chasse te réservera de grandes surprises.
Je fais l’objet d’un chapitre dans l’ouvrage de M. Serge Bouchard intitulé Confessions animales – Bestiaire. En voici un extrait :
« Je suis la petite chasse, la fricassée de tous les jours, la dernière prise des vieilles et le premier trophée des enfants. Avec le lièvre et le poisson, j’ai assuré la subsistance de toutes ces bonnes gens qui vivaient dans le bois. Humblement dit, je suis le bouillon de la dernière chance. Je sais bien que le grand chasseur parle de caribous, d’ours et de gibiers remarquables. Plus l’animal est gros, plus le tueur est un héros. Personne ne part en safari pour tuer la perdrix. Mais les petits jours s’égrènent au fil de la petite chasse et du petit gibier. » (Confessions animales – Bestiaire de Serge Bouchard, illustration de Pnina C. Gagnon, Montréal, Les éditions du passage, 2006).
Si tu fais partie de la relève et que tu as envie de mettre le nez dehors pour me rencontrer dans mes quartiers, tu peux te procurer un permis d’initiation à la chasse. Pour en savoir plus sur le sujet, clique ici . Qui sait? Je figurerai peut-être au menu prochainement. Mais peu importe le résultat de ta chasse, je te ferai vivre toute une aventure, parole de Galliforme!
Lorsque tu achètes ton permis, une partie de la somme est réinvestie dans des projets d’aménagement et de restauration des habitats fauniques par l’intermédiaire de la Fondation de la faune. Les retombées économiques de la chasse sont importantes. Les adeptes de la chasse dépensent des centaines de millions de dollars par année.
Il paraît que…
- Je suis l’oiseau emblème de l’État de la Pennsylvanie.
- Ma longévité record serait de 8 ans et 6 mois en milieu naturel.
- Je suis absente des Îles-de-la-Madeleine. J’ai été introduite à l’île d’Anticosti.
- On me surnommait l’oiseau charpentier. On croyait, à tort, que je frappais mes ailes contre le tronc pour tambouriner.
Jeu
Pour en savoir plus…
Ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP)
- Fiche gélinotte huppée
- Pleins feux sur… la reproduction chez la gélinotte huppée
- Chasse au petit gibier
- Retombées économiques de la chasse