Accueil de la section Jeunesse
Tortue-molle à épines durant l’éclosion. © Zoo de Granby.

Pleins feux sur… les œufs de tortues

Oeufs de tortues. © Zoo de Granby.

Pâques et les cocos en chocolat, c’est un classique n’est-ce pas? Naturellement vous pensez aux poules et aux oiseaux qui pondent des œufs. Mais il n’y a pas que ces animaux à plumes qui pondent des œufs, les animaux à écailles aussi. Cette fois, allons explorer un tout autre monde, à pas de tortues… celui des œufs de tortues.

Ni chaud ni froid!

Nous sommes là depuis plus de 200 millions d’années. Nous avons vu s’éteindre les dinosaures, mais nous sommes toujours là. RESPECT!

Rappelons quelques-unes de nos caractéristiques : nous sommes des ectothermes, nous ne produisons pas notre chaleur interne, elle varie selon la température extérieure. On dit à tort que nous sommes des animaux à sang froid. En tout cas, il faut en avoir du sang-froid pour être encore là aujourd’hui!

Jeune tortue-molle à épines. © Lyne Bouthillier.

Notre corps a besoin d’une certaine température pour fonctionner. La digestion requiert un minimum de degrés pour se faire, comme la plupart des fonctions vitales, mais il y a tout de même des limites! S’il fait vraiment trop chaud, nous sommes incommodées. Connais-tu l’expression prendre des bains de soleil ou lézarder? Pour faire augmenter notre température interne, nous nous installons sur des billots ou des pierres. S’il fait trop chaud ou à l’approche d’un danger, hop nous disparaissons dans l’eau. Ce comportement se nomme thermorégulation comportementale: nous faisons varier notre température interne selon nos besoins, en nous déplaçant vers des sources de chaleur ou de froid.

Parlant de froid, l’hiver nous hivernons au fond de l’eau dans les lacs et les rivières. Notre vie est au ralenti, de quatre à six fois plus lentement qu’à l’habitude! Nous entrons en torpeur, nous ne mangeons pas, nous respirons à peine avec nos poumons, nous le faisons plus souvent par la peau.

La chaleur du printemps nous fera ressurgir de nos abris tout doucement et nous irons prendre des bains de soleil pour faire augmenter notre température et repartir notre système.

Tortue-molle à épines. © Frédérick Lelièvre.

Notre peau est recouverte d’écailles. Elles forment la carapace et le plastron qui nous protègent telle une armure, contre presque tout… sauf les « machines » véhicules en tout genre et les hélices des bateaux…  Nos pattes plus ou moins palmées selon les espèces sont pourvues de griffes. Notre bec corné, tel un bec d’oiseau, sert aussi à nous défendre. Une tortue, ça peut mordre, même sans dent!

Une reproduction tout aussi lente!

Œufs de tortues. © Zoo de Granby.

Vers l’âge de 8 ou 10 ans, ou même 14 à 18 ans, nous commençons notre vie d’adulte reproducteur. L’accouplement se déroule habituellement dans l’eau, généralement au printemps et à l’automne. Le mâle fertilise la femelle qui conserve le sperme durant toute l’année. La ponte aura lieu l’année suivante! Tout prend du temps chez les tortues! De plus, les tortues ne pondent pas tous les ans.

La fertilisation est interne: les femelles creusent avec leurs pattes arrière dans le sable ou le gravier. Il doit y avoir une certaine humidité pour que les œufs se développent. Souvent la femelle va uriner avant la ponte. Une fois le travail accompli, les femelles abandonnent le nid et les œufs. Ceux-ci sont malheureusement souvent le festin des ratons laveurs et des mouffettes qui s’en régalent.

Mâle ou femelle? Ça dépend de la température!

Le nombre d’œufs varie selon l’espèce et la taille de la femelle. Les œufs éclosent vers la fin de l’été ou à l’automne (août à octobre). Les petits se dirigent alors vers le plan d’eau le plus proche. Un phénomène fascinant chez la majorité des espèces de tortues: le sexe est déterminé par la température lors de l’incubation! Chez la tortue serpentine, les œufs incubés à 20 ºC ou entre 29 ºC et 32 ºC produiront des femelles; les œufs incubés à 24 ºC donnent des mâles et les températures intermédiaires donnent des couvées mixtes. Les changements climatiques avec nos étés de plus en plus chauds auront-ils un impact? Seules deux espèces, la tortue des bois (Glyptemys insculpta) et la tortue-molle à épines (Apalone spinifera), font autrement. Ici, seule la génétique intervient.

La tortue-molle à épines

Œufs et bébés tortues-molles à épines. © Zoo de Granby.

Toutes les espèces de tortues pondent des œufs de forme ovale, sauf… la tortue serpentine (Chelydra serpentina) et moi, la tortue-molle à épines. Nos œufs sont ronds et blancs, comme des balles de ping-pong.

La coquille de mes œufs est dure un peu comme chez les oiseaux. Cette dureté provient du calcium présent dans la coquille. Les biologistes pensent que ce serait une adaptation de l’espèce pour assurer une plus grande chance de survie aux œufs qui, déposés souvent près de l’eau, sont inondés plus fréquemment lors des fluctuations du niveau des rivières ou des lacs. Comme mon nom l’indique, j’ai une carapace molle. Je suis donc plus vulnérable aux prédateurs et j’ai moins tendance que les autres espèces à m’aventurer sur la terre ferme. Mais tout cela reste à confirmer.

La tortue-molle à épines, ou TME pour les intimes, est une espèce désignée comme menacée. Je suis très rare au Québec et je me trouve seulement au lac Champlain et dans la rivière aux Brochets, dans le sud de la province.

Programme d’incubation artificielle des œufs de tortue-molle à épines. © Zoo de Granby.

Pour aider l’espèce, l’équipe de la faune du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) protège les nids contre la prédation et aménage des sites de ponte. Il y a très peu de sites et ils sont trop souvent inondés ce qui entraîne la perte des œufs. Depuis 2009, une partie des œufs est récoltée et transportée vers des établissements zoologiques pour terminer son développement. Après éclosion, les jeunes tortues sont retournées en milieu naturel. Entre 2010 et 2020, c’est près de 1700 jeunes tortues molles à épines qui ont pu être relâchées dans leur habitat naturel par le Zoo de Granby . C’est un succès!

La sauvegarde d’une espèce nécessite des ressources importantes et plusieurs organismes conjuguent leurs efforts avec le ministère pour favoriser le rétablissement de la tortue-molle à épines au Québec : le Zoo Ecomuseum et le Zoo de Granby, Environnement Canada, Conservation de la nature, la Corporation Bassin Versant Baie Missisquoi et de nombreux bénévoles de SOS-Tortues.

Tu aimerais t’impliquer dans des projets avec des animaux? Visite le site du zoo de Granby  et le zoo Ecomuseum .

Œufs de tortues victimes d’un prédateur. © Zoo de Granby.

Il paraît que…

  • Les neuf espèces de tortues du Québec appartiennent à neuf genres différents!
  • Les tortues sont protégées par la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune.
  • L’espérance de vie des tortues est de 20 à 70 ans selon les espèces!
  • La dernière mention de tortue ponctuée (Clemmys guttata) au Québec remonte à 1950.

Pour en savoir plus… 

Ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) 

L’atlas des amphibiens et des reptiles