Accueil de la section Jeunesse
Saumon atlantique. © William Cayer-Blais et Vanessa Cauchon.

Pleins feux sur… la gestion du saumon atlantique

Saumon atlantique. © Louis L’Hérault, MELCCFP.

Quand on parle de pêche sportive au Québec, le saumon atlantique (Salmo salar) est souvent dans une catégorie à part. C’est une des rares espèces de poisson qui a un permis seulement pour elle. Au Québec, il existe plusieurs permis de pêche qui peuvent être regroupés en trois grandes catégories selon les espèces convoitées : le permis de pêche au saumon atlantique, le permis de pêche à la lotte au Lac-Saint-Jean et le permis de pêche aux autres espèces sportives.

Pourquoi le saumon nécessite-t-il autant d’attention? Est-ce que c’est parce qu’on le surnomme le roi des rivières qu’il a droit à un traitement royal? Lis la suite pour en apprendre plus sur la gestion du saumon atlantique.

Une espèce particulière et populaire!

Toute l’attention que reçoit le saumon atlantique n’est pas sans raison. Tout d’abord, cette espèce a un cycle de vie très particulier qui se déroule en moyenne sur cinq ans. De plus, le saumon est très fragile aux différents changements dans son habitat. C’est aussi une espèce populaire auprès des pêcheurs sportifs à la recherche d’émotions fortes. La pêche au saumon est donc importante pour l’économie de certaines régions. Voilà plusieurs raisons qui expliquent pourquoi le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP), qui est responsable de la gestion durable de la faune au Québec, s’intéresse de près à cette espèce.

Afin d’assurer la conservation et la mise en valeur de la faune, le Ministère rédige, avec l’aide de nombreux collaborateurs, des plans de gestion pour certaines espèces exploitéesEspèces exploitées : espèces qui font l’objet d’une saison de pêche, de chasse ou de piégeage. au Québec. Un plan de gestion est un document qui permet de faire le point sur la situation de certaines espèces au Québec et de mieux baliser l’exploitation de ces espèces.

Ouf! C’est très théorique tout ça! Mais qu’en est-il du saumon?

Eh bien, le saumon atlantique anadrome fait l’objet d’un plan de gestion à lui seul.

Anadrome… ce mot nécessite une petite explication avant d’aller plus loin.

À chaque rivière sa population de saumons!

Le saumon dont il est question dans le plan de gestion est le saumon atlantique anadrome, c’est-à-dire le saumon migrateur qui naît en eau douce, effectue une migration en eau salée pour ensuite revenir se reproduire en eau douce. Le terme saumon anadrome (ou migrateur) est utilisé par opposition aux saumons résidents qui passent la totalité de leur vie en eau douce. On nomme ces derniers ouananiches; peut-être que cela te dit quelque chose? Il s’agit en fait de la même espèce que le saumon anadrome, mais avec un cycle de vie qui s’effectue uniquement en eau douce. Pour bien comprendre le cycle de vie de ce poisson, consulte la capsule Pleins feux sur… le saumon atlantique

Rivières à saumon du Québec. © MELCCFP.

Un aspect fascinant du cycle de vie du saumon anadrome est qu’il retourne toujours à sa rivière natale pour se reproduire. La capacité qu’a le saumon à retrouver le cours d’eau qui l’a vu naître, après une ou plusieurs années passées en mer, est extraordinaire. Cette caractéristique de la biologie du saumon fait en sorte que chaque rivière possède une population distincte de saumons présentant un profil génétiqueProfil génétique : séquence d’ADN qui caractérise une population (nombre moyen d’années passées en mer, âge à la migration vers la mer, dates de montaison en rivière). unique. Cette particularité est à l’origine de la gestion « rivière par rivière », un mode de gestion adapté à chaque rivière à saumon et basé sur la conservation d’un nombre suffisant de reproducteurs. Étant donné que le Québec compte 114 rivières à saumons, dont plus de la moitié sont fréquentées par les pêcheurs, ça fait beaucoup de rivières à suivre.

Laisse-moi t’expliquer un peu comment cela fonctionne.

Des maths pour bien gérer le saumon!

Voici quelques étapes simples qui font partie de la gestion de la pêche au saumon. Es-tu prêt à faire un peu de maths?

Barrières de comptage. © Maxime Guérard.

1- Suivi des montaisonsMontaison : migration de poissons qui remontent un cours d’eau pour aller frayer.

Avec l’aide de nombreux organismes et partenaires, le décompte des saumons est fait dans environ 40 rivières au Québec chaque année. Eh oui, tu as bien lu, les saumons adultes qui remontent ces rivières sont comptés à différents moments durant l’été. Ces décomptes permettent d’estimer le nombre de saumons qui iront se reproduire dans chaque rivière. Ils se font soit dans des passes migratoires ou à l’aide de barrières de comptage. Certains décomptes se font aussi en canot ou même en apnée lorsque la teinte de l’eau le permet, comme c’est le cas en Gaspésie et sur l’île d’Anticosti.

2- Enregistrement des captures

Au Québec, les pêcheurs de saumons doivent obligatoirement déclarer les saumons qu’ils conservent.

Par contre, il n’est pas obligatoire de déclarer les saumons qui sont remis à l’eau. Afin de ne pas surestimer les chiffres utilisés, le MELCCFP considère un taux de mortalité de 7 % lié à la remise à l’eau. La déclaration volontaire par les pêcheurs des saumons qu’ils remettent à l’eau est donc essentielle à la saine gestion de l’espèce. Tous les pêcheurs sont encouragés à la faire.

Ces données de captures et de mortalités sont soustraites du nombre de saumon en montaison pour permettre au MELCCFP de connaître le nombre de reproducteurs dans les rivières au moment de la fraie.

Oeufs de saumon. © Réserve faunique de Matane, le monde en image, CCDMD.

3- Calcul du nombre d’œufs déposés par rivière

Avec l’aide des données obtenues en 1 et 2, il est possible d’estimer le nombre d’œufs pondus par les saumons.

Par exemple, voici le calcul du nombre d’œufs déposés à la fin de la saison pour la rivière Bonaventure. Les chiffres utilisés sont différents s’il s’agit de petits saumons ou de grands saumons, mais le calcul est le même.

Grâce aux données de montaison et de captures, il est possible de calculer le nombre de reproducteurs de petits saumons (P.S.) et de grands saumons (G.S.).

Calcul pour les petits saumons (P.S.)

En utilisant le pourcentage de femelles de P.S. et leur poids moyen (chiffres spécifiques à la rivière Bonaventure: 5 % et 1.38 kg), on obtient le nombre d’œufs déposés par les petits saumons de la rivière Bonaventure.

Saurais-tu faire le même calcul pour les grands saumons de la rivière Bonaventure?

Pêcheurs sur la rivière Bonaventure. © Stéphane Déry.

Pour obtenir le nombre d’œufs total déposés dans la rivière Bonaventure, on doit additionner le nombre d’œufs de petits et de grands saumons, soit un total d’un peu plus de 5 millions d’œufs (5.03 M). Ce n’est pas facile de s’imaginer à quoi peut ressembler autant d’œufs!

  Petit saumon (P.S.) Grand saumon (G.S.)
Autre nom madeleineaux rédibermarins
Âge Un hiver en mer Deux hivers en mer ou plus
Longueur à la fourche Moins de 63 cm 63 cm ou plus
Sexe 85 % mâle* 60 % femelle*
Nombre d’œufs par kilogramme de femelle 2 025 œufs/kg 1 745 œufs/kg
Poids moyen 1,8 kg* 5,5 kg*
Nombre d’œufs par femelle 3 645 9 598

*Les pourcentages de chacun des sexes et les poids moyens sont approximatifs et varient d’une rivière à l’autre et d’une année à l’autre.

4- Détermination des seuils (niveaux) de conservation

Pour chaque rivière, un seuil de conservation démographique et un seuil de conservation optimal sont déterminés par le MELCCFP. Les seuils de conservation sont établis à l’aide de modèles scientifiques et de calculs complexes. Ils sont exprimés en nombre d’œufs.

Par exemple, pour la rivière Bonaventure, le seuil de conservation démographique est de 1 343 847 œufs et le seuil de conservation optimal est de 3 934 847 œufs.

5- Catégories de populations de saumons selon les seuils de conservation

Catégorisation des populations de saumons pour la gestion. © MELCCFP.

Les seuils de conservation permettent de classer les populations de saumons de chacune des rivières selon trois zones : la zone saine, la zone de prudence et la zone critique.

Bon. On a maintenant une estimation du nombre d’œufs déposés dans la rivière Bonaventure (3) et on connaît aussi le nombre d’œufs requis pour chacun des deux seuils (4). On fait quoi maintenant avec ces chiffres?

Eh bien, on les compare et on détermine dans quelle zone (5) se trouve la population de la rivière Bonaventure!

Ces calculs sont faits chaque année par les gestionnaires de la faune et pour de nombreuses rivières à saumon partout au Québec.

Saumons atlantiques. © William Cayer-Blais et Vanessa Cauchon.

Les bonnes règles pour chaque rivière à saumon!

Les règles de pêche de chaque rivière à saumon sont déterminées en fonction de la zone dans laquelle la rivière se trouve. Ainsi, une rivière dont la population se trouve dans la zone saine pourrait bénéficier de règles plus permissives. Par exemple, les pêcheurs pourraient avoir la permission de conserver un grand saumon à partir du 1er août. Cette autorisation est possible seulement si les montaisons en cours de saison sont suffisantes pour permettre l’atteinte du seuil de conservation optimal en fin de saison. À l’inverse, on pourrait exiger la remise à l’eau de tous les saumons pêchés sur une rivière dont la population se trouve dans la zone critique et celle-ci pourrait même être complètement fermée.

Entre ces deux cas, les gestionnaires de la faune peuvent ajuster les règles à plusieurs niveaux : nombre de saumons que les pêcheurs peuvent conserver, possibilité de conserver seulement les petits saumons, remise à l’eau obligatoire de tous les saumons, etc. Des outils de gestion sont à leur disposition pour prendre des décisions éclairées. Plusieurs autres facteurs doivent aussi être pris en considération. Les étapes présentées dans cette capsule ne représentent qu’une petite partie de la gestion de cette espèce. Il y a aussi la cible de gestion, le taux de survie lors de la remise à l’eau en eau chaude, le seuil de conservation génétique, les pêcheries mixtesPêcheries mixtes : pêcheries en mer, en dehors de la rivière natale des saumons., l’utilisation des données moyennes sur plusieurs années, le partage de la ressource entre les différents utilisateurs, le taux de survie en mer, la gestion en temps réel avec les bilans de mi-saison, etc.

Les choix que l’on fait aujourd’hui dans la gestion de cette espèce emblématique doivent permettre d’assurer la prospérité des populations de saumons à long terme tout en assurant une qualité de pêche pour l’ensemble des pêcheurs. Il est donc essentiel de continuer de suivre de près les populations de saumons et de poursuivre les projets de recherche afin d’améliorer nos connaissances sur cette espèce.

 Pourquoi ne pas t’intéresser un peu plus à cette espèce et consulter le plan de gestion? Qui sait? Ça te donnera peut-être le goût d’aller taquiner le saumon pendant tes vacances!

Il paraît que…

  • Les rivières du Québec sont reconnues internationalement pour leurs saumons de grandes tailles. D’ailleurs, as-tu entendu parler du saumon de 19 kilos (42 livres) pêché dans la rivière Cascapédia en juin 2019?
  • Depuis 2018, il est possible pour les détenteurs d’un certificat « Pêche en herbe » de pratiquer la pêche au saumon (avec remise à l’eau obligatoire).
  • Le saumon atlantique peut se reproduire plus d’une fois dans sa vie.

Jeu

Pour en savoir plus…

Ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) 

Fédération québécoise pour le saumon atlantique

Pêches et Océans Canada

Enseignantes et enseignants

Programme éducatif de la Fédération québécoise pour le saumon atlantique