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Parasitoïde de la famille des Braconidae. © Richard Bartz.

Pleins feux sur… l’Halloween et les parasitoïdes

Momie de puceron parasité par un Aphidiidae. Remarquez l'orifice de sortie du parasitoïde.

Momie de puceron parasité par un Aphidiidae. Remarquez l’orifice de sortie du parasitoïde. © Remi Coutin et Nicole Hawlitzky, Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE).

Imagine un être maintenu en vie pour servir de nourriture, dévoré lentement par une larve vorace qui complète sa croissance à l’intérieur du corps de son hôteHôte : organisme vivant qui héberge un parasite. L’hôte est nécessaire pour que le parasite puisse compléter son cycle de vie.. Cet animal est condamné à une fin certaine et de sa carcasse émergera… l’envahisseur devenu adulte! Un véritable scénario de science-fiction, n’est-ce pas? Une histoire qui a sans doute inspiré le réalisateur du film Alien, le huitième passager. Dans ce film, une reine pond des œufs. Une créature sort de cet œuf, se fixe au visage d’un humain et pénètre dans son corps pour y poursuivre son développement. Elle en sort en tuant son hôte. Et pourtant, cette scène d’horreur se déroule vraiment dans le monde des parasitoïdes et, croyez-moi, c’est beaucoup plus dégoûtant que dans le film…

Parasitoïde ou profiteur sans scrupule ?

Un parasitoïde, c’est un organisme vivant qui se développe dans ou sur un autre organisme, son hôte. Il en tire sa subsistance et le résultat direct ou indirect de son développement est de tuer cet hôte. De façon générale, il peut s’agir d’un insecte, d’un champignon, d’une bactérie ou d’un virus. Cependant, la majorité des parasitoïdes connus sont des insectes. Jusqu’à ce jour, on a répertorié environ 87 000 espèces d’insectes parasitoïdes. Ils se répartissent dans six ordres : les hyménoptères (guêpes), les diptères (mouches), les coléoptères, les neuroptères, les lépidoptères (papillons) et les trichoptères.

Femelle de Phanerotoma flavitestacea, hyménoptère Braconidae, endoparasitoïde des chenilles puis ectoparasitoïde jusqu'à la consommation complète de son hôte.

Femelle de Phanerotoma flavitestacea, hyménoptère Braconidae, endoparasitoïde des chenilles puis ectoparasitoïde jusqu’à la consommation complète de son hôte. © Nicole Hawlitzky, INRAE.

Alors que la plupart des parasites ne tuent pas leur hôte, le parasitoïde provoque toujours sa mort. Quelques espèces de parasitoïdes, surtout des diptères, choisissent comme hôtes des araignées, des chilopodes (« cent-pattes ») et même des vertébrés! Par exemple, Lucilia bufonivora est un parasitoïde qui pond plusieurs œufs dans les cavités de la tête des crapauds et des grenouilles. Les larves se développent, pénètrent dans la tête et s’attaquent au cerveau de ces amphibiens : mort assurée! Soyez sans crainte, cette situation n’est pas commune! La majorité des victimes sont des insectes. Il y a des parasitoïdes pour tous les stades de développement des insectes : œuf, larve, pupe et adulte. Le parasitoïde est habituellement spécialisé pour un stade particulier. En général, le stade larvaire est le plus recherché.

On distingue plusieurs catégories de parasitoïdes…

On distingue deux catégories de parasitoïdes en fonction de l’endroit où ceux-ci pondent leurs œufs : soit à l’intérieur, soit à l’extérieur de leur hôte.

L’endoparasitoïde

Endoparasitoïde.

Endoparasitoïde.

La femelle parasitoïde pond un ou plusieurs œufs dans l’hôte sans le tuer. L’hôte poursuit son développement tout en se faisant dévorer de l’intérieur par la larve. Celle-ci finira par l’absorber entièrement, et un nouvel adulte parasitoïde émergera. Dans certains cas, l’œuf est pondu sur la nourriture de l’hôte qui, sans le savoir, introduit cet intrus dans son corps. La larve née de l’œuf creuse ensuite son chemin dans les tissus de l’hôte.

Ectoparasitoïde.

Ectoparasitoïde.

 

L’ectoparasitoïde

La femelle parasitoïde tue ou paralyse partiellement l’hôte puis pond un ou plusieurs oeufs sur celui-ci. L’œuf éclot et la larve introduit sa tête dans le corps de son hôte.

 

On peut aussi distinguer les parasitoïdes selon le nombre d’œufs déposés sur l’hôte ou dans celui-ci… Un seul œuf ou plusieurs œufs?

Parasitoïde solitaire.

Parasitoïde solitaire.

 

Parasitoïde solitaire

Lorsqu’un seul œuf est déposé sur l’hôte, qu’il soit un endo ou un ectoparasitoïde.

 

Parasitoïde grégaire.

Parasitoïde grégaire.

Parasitoïde grégaire

Lorsque plusieurs œufs sont déposés sur l’hôte, qu’il soit un endo ou un ectoparasitoïde.

 

 

 

Et ce n’est pas tout! On peut aussi catégoriser les parasitoïdes selon la façon dont ils utilisent leur hôte après la ponte!

Le parasitoïde koïnobionte

Il ne tue pas immédiatement son hôte après la ponte. L’hôte poursuit ses activités : se déplacer, se nourrir et assimiler des ressources jusqu’à la sortie de l’intrus, qui lui est fatale.

Le parasitoïde idiobionte

Il tue ou paralyse son hôte. Les œufs et les larves se développent rapidement pour tirer profit au plus vite des ressources de l’hôte. En général, le parasitoïde choisit un hôte mature afin d’offrir le plus de nourriture possible aux larves.

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué?

Mais la vie n’est pas si facile pour les parasitoïdes! Ils sont eux aussi victimes d’autres parasitoïdes! Hé oui, un parasitoïde de parasitoïde, rien de moins qu’un hyperparasitoïde! Certains hyperparasitoïdes sont obligatoires : ils ne peuvent se développer que dans ou sur un autre parasitoïde. Il existe aussi des hyperparasitoïdes facultatifs : la femelle pond directement dans l’hôte s’il n’est pas parasité, mais elle pond dans le parasitoïde si l’hôte est parasité.

Et tenez-vous bien, il existe même un… hyperhyperparasitoïde!

Les parasitoïdes au service des humains?

Femelle d'Encarsia formosa. Position de ponte. Trialeurodes vaporariorum.

Femelle d’Encarsia formosa. Position de ponte. Trialeurodes vaporariorum.
© Jacques Gambier, INRAE.

Les humains ont appris à tirer profit de ces monstres du monde animal. Ces derniers sont mis à contribution pour contrôler les espèces nuisibles aux cultures. Les parasitoïdes font partie de l’arsenal de la lutte biologique. Les deux principaux ordres les plus souvent utilisés sont les hyménoptères et les diptères.

Dans la famille des Trichogrammatidae, on retrouve les plus petits insectes du monde; ils ne font même pas un millimètre! Peu importe leur petite taille, plus de 30 pays ont recours à leurs services pour contrôler des insectes ravageurs de différentes cultures : riz, tomates, betteraves, blé et plus encore. Pour lutter contre la pyrale du maïs (Ostrinia nubilalis), on répand ainsi dans les champs de maïs de minuscules trichogrammes, qui vont pondre dans les œufs du papillon de la pyrale du maïs.

Mouche blanche.

Mouche blanche. © Michigan Science Art.

 

Dans les serres, on retrouve Encarsia formosa, un hyménoptère de la famille des Aphelinidae qui s’attaque à l’aleurode des serres, Trialeurodes vaporariorum. C’est la fameuse mouche blanche qui infeste parfois nos plantes dans la maison. On peut se procurer des pupes d’aleurodes déjà parasitées et collées sur des fiches. Une fiche peut produire plus de mille individus parasitoïdes. Les serriculteurs les distribuent à l’intérieur de la serre. Ils installent aussi des pièges collants pour capturer les aleurodes. Dès qu’un aleurode ennemi est capturé, c’est le signal pour relâcher les parasitoïdes E. formosa.

 

 

La coévolution entre les parasitoïdes et leurs hôtes

Pupariums d'aleurode Trialeurodes vaporariorum, ravageur en serres. Le puparium noir a été parasité par Encarsia sp.

Pupariums d’aleurode Trialeurodes vaporariorum, ravageur en serres. Le puparium noir a été parasité par Encarsia sp. © Nicole Hawlitzky, INRAE.

Dans cette lutte pour la survie, les victimes ont développé diverses stratégies pour se défendre : se cacher, faire le mort ou se débarrasser des œufs sur sa peau. Leur système immunitaire possède des cellules semblables à nos globules blancs qui attaquent les intrus. Il se forme alors une capsule qui étouffe l’œuf ou la larve.

Que fait le parasitoïde pour déjouer le système de défense de son hôte? Au moment de la ponte, le parasitoïde injecte un virus ou une toxine qui affecte le système immunitaire de son hôte. Il peut aussi pondre dans un œuf plutôt que dans une larve. C’est plus facile, car l’œuf n’a pas de défense. Par contre, il offre moins de nourriture pour la larve.

Les parasitoïdes entretiennent une relation étroite avec leurs hôtes. Ils ont développé une façon particulière de se reproduire. Il nous reste encore beaucoup à apprendre sur ces insectes. De plus, on ne sait pas comment les parasitoïdes et leurs hôtes vont réagir aux changements climatiques. Qui sait, de nouvelles découvertes conduiront peut-être à la réalisation d’un film de science-fiction encore plus sensationnel. Alien n’a qu’à bien se tenir!

Il paraît que…

Femelle de Rhyssa persuasoria en train de pondre à travers le bois dans une chenille xylophage.

Femelle de Rhyssa persuasoria en train de pondre à travers le bois dans une chenille xylophage. © Remi Coutin et Nicole Hawlitzky, INRAE.

  • Le nombre total d’insectes dans le monde actuellement serait de 10 milliards de milliards! Environ un million d’espèces sont connues et nommées, mais il en resterait encore quatre millions à découvrir. Un peu plus de 10 % des insectes connus sont des parasitoïdes.
  • L’importance du mode de vie parasitoïde varie d’un ordre d’insectes à l’autre : 67 % des espèces chez les hyménoptères, 18 % chez les diptères et environ 1 % des espèces pour les ordres suivants : coléoptères, neuroptères, lépidoptères et trichoptères.
  • Les familles d’hyménoptères les plus couramment utilisées dans la lutte biologique sont les Braconidae, les Ichneumonidae, les Eulophidae, les Pteromalidae, les Encyrtidaeet les Aphelinidae. Les diptères, quant à eux, sont principalement représentés par la famille des Tachinidae.

 

Pour en savoir plus…

Groupe uni des éducateurs-naturalistes et professionnels en environnement (GUEPE)