Accueil de la section Jeunesse
Cygnes formant un cœur. © Pikist.

Pleins feux sur… la Saint-Valentin et la polyandrie

Dans le monde animal, la séduction est généralement l’affaire du mâle. Il s’agit d’attirer l’attention d’une partenaire afin de se reproduire. Plusieurs stratégies sont utilisées : couleurs, chants, odeurs, offrandes, combats entre mâles… Les mâles qui parviennent à séduire une femelle peuvent transmettre leurs gênes et ainsi assurer leur descendance. Généralement, les mâles qui parviennent à leurs fins sont ceux qui ont le meilleur bagage génétique, ce qui leur assure une descendance nombreuse et adaptée à l’environnement. C’est là une partie de la théorie de l’évolution proposée par Darwin. Et si on envisageait les choses autrement, en adoptant le point de vue des femelles? Partons à la découverte de la séduction vue par la « gent féminine »!

La monogamie, pour une saison ou pour la vie?

Le modèle de formation des couples le plus courant est la monogamie : il implique un mâle et une femelle. Chaque saison de reproduction, un nouveau couple se forme. Chez les oiseaux, c’est comme ça que ça se passe la plupart du temps. Le merle d’Amérique (Turdus migratorius) chante, revendique son territoire, attire la femelle qui s’y installe et hop! On aménage un nid dans le garage et on y élève sa famille!

Il y a aussi des couples formés pour la vie, comme chez l’oie des neiges (Anser caerulescens), le renard roux (Vulpes vulpes), le cygne siffleur (Cygnus columbianus), le pygargue à tête blanche (Haliaeetus leucocephalus) et le castor du Canada (Castor canadensis).

La polygamie et la polyandrie

Éléphants de mer.

Éléphants de mer. © Sarah Stierch.

Chez les espèces qui pratiquent la polygamie, un mâle s’accouple avec plusieurs femelles qu’il doit trouver sur son territoire. Il peut aussi avoir un « harem » et garder les femelles loin des autres mâles. C’est d’ailleurs le cas des éléphants de mer (Mirounga spp.)!

Dans la nature, contrairement à ce que Darwin avançait, la séduction n’est pas réservée aux mâles. De plus, chez de nombreuses espèces, les femelles ont plus d’un partenaire. Ce comportement reproducteur est appelé « polyandrie ». Il a d’abord été observé chez les insectes sociaux. Dans les colonies d’abeilles et de fourmis, seules les reines se reproduisent. Elles ont recours à plusieurs mâles pour être fécondées. Elles emmagasinent le sperme de ces différents individus dans leur spermathèque, et la fertilisation a lieu plus tard, après un délai qui peut s’étendre de quelques jours à quelques mois.

Quels sont les avantages de la polyandrie?

  • La femelle obtient plus de nourriture et de protection. Plus de soupirants signifie plus de cadeaux!
  • La femelle ne dépense pas d’énergie à repousser les avances des mâles, elle les accepte toutes!
  • La femelle obtient une plus grande diversité de gènes dans sa descendance. Un avantage pour faire face aux changements éventuels dans l’environnement!
  • La femelle s’assure d’obtenir le « meilleur sperme ».
  • La femelle augmente ses chances d’être fertilisée avec plus de spermatozoïdes.
  • La femelle peut choisir le mâle le plus apte à s’occuper des jeunes, lequel pourrait être différent du mâle reproducteur.

La polyandrie a eu des conséquences dans le monde des mâles. La compétition s’exerce sur un autre plan! Nul besoin d’être le plus fort ou le plus beau; désormais, tout se joue à l’échelle des différents spermatozoïdes qui se battent pour fertiliser les ovules. C’est ce qu’on appelle la compétition spermatique! Plus encore, les mâles et leurs spermatozoïdes auraient développé des stratégies.

Le coq (Gallus gallus) ajuste sa production de spermatozoïdes en fonction de la compétition potentielle. Il en produit plus lorsqu’une nouvelle poule s’ajoute à la basse-cour, cette dernière suscitant plus de convoitise.

Chez la souris sylvestre (Peromyscus maniculatus), les spermatozoïdes issus du même mâle semblent se reconnaître entre eux et forment des groupes. Ils peuvent ainsi se déplacer plus rapidement qu’un spermatozoïde seul. Tous pour un et un pour tous : c’est la course à la fécondation!

Certaines espèces possèdent deux groupes de spermatozoïdes, l’un aidant l’autre. Un groupe stérile se sacrifie et subit les assauts chimiques de la femelle, ce qui permet au groupe fertile d’atteindre son but. Un vrai travail d’équipe!

Tous les goûts sont dans la nature

Phalarope à bec étroit.

Phalarope à bec étroit. © Ron Wolf CalPhotos.

Avec le temps, les biologistes ont constaté que cette pratique était beaucoup plus répandue dans le monde animal, notamment chez les insectes, les oiseaux, les amphibiens et les mammifères. Citons quelques exemples.

Chez les phalaropes (Phalaropus spp.), les rôles sont carrément inversés. La femelle porte le plumage coloré et courtise le mâle. Les mâles sélectionnent les plus grosses femelles, qui peuvent pondent de plus gros œufs! Une fois la ponte effectuée, elle lui laisse le soin de la couvée.

Chevalier grivelé.

Chevalier grivelé. © J.P. Myers ADW.

Chez le chevalier grivelé (Actitis macularius), ce sont les femelles qui établissent leur territoire avant l’arrivée des mâles sur les sites de reproduction. Elles courtisent un mâle, s’accouplent avec lui et les deux partenaires construisent le nid. La femelle pond ensuite quatre œufs qui sont incubés par les deux parents. Les oisillons, qui naissent 21 jours plus tard, sont pris en charge par le mâle mais deviennent rapidement indépendants. Comme la femelle peut répéter ce petit manège cinq fois par an, elle peut produire une vingtaine de petits durant l’année.

Rat-taupe nu.

Rat-taupe nu. © Michigan Science Art.

Le rat-taupe nu (Heterocephalus glaber), ce mammifère que l’on retrouve en Afrique, vit en colonie et, comme chez les insectes sociaux (abeilles et fourmis), une seule femelle reine se reproduit avec plusieurs mâles. La reine peut avoir cinq portées de sept petits durant l’année. Les autres membres de la colonie ont des tâches particulières à accomplir telles que le soin des jeunes, leur élevage, le nettoyage…

 

Baleine noire.

Baleine noire. © Michigan Science Art ADW.

Chez la baleine noire de l’Atlantique Nord (Eubalaena glacialis), on pense qu’une femelle pourrait être fécondée par plusieurs mâles. Ces derniers forment des groupes qui peuvent compter jusqu’à 40 individus. Tous ces mâles se font concurrence pour s’approcher de la femelle et s’accoupler, en particulier lorsqu’elle monte à la surface pour respirer. Les mâles de cette espèce possèdent les testicules les plus gros de tous les animaux : ils peuvent peser plus de 900 kilogrammes! Tout porte à croire qu’une compétition a lieu par rapport à leur taille et que les mâles qui ont les plus gros testicules auraient plus de chance de se reproduire.

Colibri à gorge rubis.

Colibri à gorge rubis. © J.P. Myers ADW.

 

Chez le colibri à gorge rubis (Archilochus colubris), le mâle établit et défend un territoire. Les femelles qui s’y aventurent sont courtisées. Le mâle exécute une danse en pendule pour les séduire. Une fois l’accouplement effectué, la femelle se charge de la construction du nid et de l’élevage des jeunes. Elle peut avoir jusqu’à trois portées par année avec différents mâles.

 

Accenteur mouchet.

Accenteur mouchet. © Wikipédia.

Chez l’accenteur mouchet (Prunella modularis), une espèce d’oiseau qui vit en Europe, des études ont également montré que la femelle cherche activement à se reproduire avec deux mâles qui, ne pouvant distinguer leur progéniture de celle de l’autre mâle, s’occuperont ensuite tous deux de la nichée! Par contre, leur investissement dans les soins parentaux varie en fonction de leur accès à la femelle durant la reproduction, ce qui semble être un bon indice de paternité!

 

Il paraît que…

Mésange bleue.

Mésange bleue. © Wikipédia.

  • Des analyses génétiques menées sur la descendance de mésanges bleues (Cyanistes caeruleus, une espèce d’Europe), des oiseaux pourtant connus pour former des couples stables, ont montré que 20 à 40 % des petits d’une nichée étaient issus d’un père illégitime.
  • Chez l’abeille domestique (Apis mellifer), le nombre moyen de spermatozoïdes par mâle est de 4,5 millions.
  • Les colonies de rat-taupe nu peuvent atteindre jusqu’à 80 individus pour un seul couple reproducteur! Les individus subordonnés mangent les fèces de leur mère postpartum, qui contiennent une hormone appelée « estradiol ». Cette hormone modifie leur comportement en les rendant plus enclins à contribuer aux soins et à l’élevage des jeunes.
  • La coopération entre mâles peut être avantageuse dans les milieux où les ressources sont limitées… Deux mâles sont plus efficaces qu’un seul pour trouver à manger et protéger le territoire!
  • Il peut être avantageux pour un individu d’aider un individu apparenté à se reproduire car, étant de la même famille, ils partagent des gènes… C’est ce qu’on appelle la sélection de parentèle!

Pour en savoir plus…

Baleines en direct

eBird