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Combattants variés. © Frans Vandewalle.

Pleins feux sur… la reproduction et la technique des mâles satellites

Mâles satellites. © Picto.qc.ca.

Afficher ses couleurs, montrer sa force, éloigner les rivaux, ouf! Il faut en mettre du temps et de l’énergie pour courtiser une femelle! On le sait, elle choisira le plus beau et le plus fort pour avoir la meilleure descendance possible, car elle veut avoir des petits en santé! Il faut absolument sortir du lot et se faire remarquer parmi tous les prétendants. Toutes ces activités pour attirer son attention, parfois au péril de sa vie, sont très exigeantes. Dans ce monde cruel, on pourrait croire que les plus petits et les moins forts n’ont aucune chance. Détrompez-vous, il suffit parfois de se faire discret, de laisser l’autre faire tout le boulot, de tourner autour l’air de rien… comme un satellite!

Le but ultime : être choisi par une femelle!

Les lois de la nature étant ce qu’elles sont, si on veut rester en vie, on doit éviter les prédateurs et les maladies. Pour assurer la survie de son espèce et transmettre SES gènes, il faut évincer les concurrents, ne pas être blessé ou même tué dans les combats et surtout, être celui sur lequel la femelle jettera son dévolu. Chez plusieurs espèces, le mâle qui souhaite assurer sa descendance va défendre son territoire ou son haremHarem : groupe d’animaux composé d’un ou deux mâles et de plusieurs femelles.. Les combats entre mâles sont le prix à payer si on veut être choisi par la femelle.

Pas de souci pour les mâles satellites, on économise temps et énergie. Nul besoin d’afficher ses atouts devant la galerie et de faire la cour, il suffit de se faufiler au bon moment! Pas besoin de se battre contre les plus forts! Terminé les efforts pour être le plus beau ou le plus coloré! Il suffit d’attendre ou d’être là au bon moment.

Selon le dictionnaire de l’éthologieÉthologie : science qui étudie le comportement animal., l’expression « mâle satellite » a été créée à l’origine pour désigner, chez le combattant varié (Calidris pugnax), des mâles aptes à se reproduire qui n’établissent pas de territoire propre, mais demeurent sur le territoire ou l’arène de parade d’autres mâles ou à leur périphérie.

La technique du combattant varié!

Le combattant varié est un oiseau limicoleLimicole : oiseau à longues pattes qui fréquente les zones humides. du nord de l’Eurasie qui passe l’hiver en Afrique et dans certaines régions du sud de l’Europe, de l’Arabie, de l’Inde et de l’Australie. Au moment de la reproduction, les mâles dominants prennent position dans un lek, un genre d’arène de lutte où ils performent pour attirer des femelles. Ces mâles ont un plumage foncé. Cet espace est partagé avec des mâles au plumage clair, les satellites. La femelle peut choisir l’un ou l’autre. Il semble y avoir une tolérance entre les deux types de mâles.

Combattant varié. © Gillian Harris.

Les satellites seraient-ils des profiteurs? Pas toujours, car dans bien des cas, ils participent aussi à la défense du territoire du maître des lieux. À ce moment, même le mâle dominant profite de cette « association » dont le but ultime est d’atteindre les femelles.

Les mâles satellites se rencontrent chez une centaine d’espèces dans toutes les classes de vertébrés et chez certaines espèces d’invertébrés, comme les limules et les grillons.

La technique du grillon!

Derrière les doux chants des grillons que l’on entend lors des belles soirées d’été se cachent des stratégies de conquête. Alors qu’un mâle chante le plus fort possible pour attirer une femelle, un autre mâle veille en silence. Chanter pour attirer l’attention, c’est aussi dangereux, car on risque de se faire repérer par un prédateur. Le grillon satellite le sait, il se tait et il attend patiemment l’arrivée de la femelle pour l’intercepter.

La technique de la grenouille des bois!

Grenouilles des bois.
© Étienne Plasse.

C’est le même scénario chez la grenouille des bois (Lithobates sylvaticus). Cette fois, il y a des attroupements dans les mares d’eau. Plusieurs mâles chantent en chorale. Alors pour se distinguer dans la masse, il y a du travail à faire. Le mâle gonfle son sac vocal, il s’égosille pour attirer la femelle. Pendant ce temps, le satellite qui demeure silencieux se tient prêt à passer à l’action dès la venue d’une femelle.

 

La technique de la perdrix grise!

Perdrix grise. © Julia Adamson.

Chez la perdrix grise (Perdix perdix), le satellite pousse un peu plus loin son implication. Il se joint au couple! Avec le temps, il finit par être accepté et participe même à l’élevage des jeunes. Comme trois paires d’yeux valent mieux que deux pour protéger la couvée, ces trios auraient de meilleurs succès de reproduction qu’un simple couple.

La technique des limules!

Les limules (Limulus polyphemus) existent depuis 350 millions d’années. Leur forme, plutôt étrange, leur a valu le surnom de « crabe fer à cheval ». Pourtant, ce ne sont pas des crustacés mais plutôt des arthropodes. Elles sont plus proches des araignées et des scorpions. Une scientifique, Mme H.J. Brockmann, a réalisé plusieurs projets de recherche en Floride pour comprendre les stratégies de reproduction de ces animaux. Elle a entre autres découvert que :

  • Un couple peut être formé d’un mâle agrippé à une femelle. Ce mâle va fertiliser les œufs qu’elle pond dans le sable. Le couple demeurera seul;
  • Un couple peut être formé d’un mâle agrippé à une femelle, accompagné de plusieurs mâles satellites qui essaient tous de fertiliser les œufs. Ainsi, il y a une paternité multiple;
  • Un mâle qui arrive pourra se joindre à un groupe de mâles satellites. 

Limules. © H.J. Brockmann.

 

La technique du saumon atlantique!

Du côté des poissons, le saumon atlantique (Salmo salar) n’est pas en reste. Le cycle vital du saumon se déroule ainsi : œufs – alevins vésiculés – alevins – tacons – saumoneaux – saumons adultes. Les adultes passent une ou quelques années en mer pour engraisser et se développer. Ils reviennent ensuite dans leur rivière natale pour se reproduire. Ce voyage n’est pas sans risque : prédateurs, pêcheurs, compétition, plusieurs menaces guettent les saumons lors de ce grand périple.

Mais les saumons ont plus d’un tour dans leur sac. Il y a des tacons précoces! Ce sont des jeunes poissons, mais ils sont en mesure de se reproduire, ils sont matures sexuellement. Ils seraient de plus en plus nombreux et les chercheurs pensent qu’ils demeureraient en rivière toute leur vie. Lors du retour des grands saumons, ils se faufilent entre le couple et, au moment opportun, ils fertilisent les œufs au-dessus du nid. Ni vu ni connu! Une étude menée dans la rivière des Escoumins a démontré que les tacons mâles précoces étaient les pères de 44 % des alevins! En plus, les alevins issus de ces mâles précoces grandissent plus vite que leurs confrères provenant des œufs fécondés par les grands mâles voyageurs! Ce n’est pas parce qu’on est petit, qu’on ne peut pas voir grand!

Il paraît que…

  • Les mâles satellites sont aussi appelés « mâles périphériques ».
  • Chez les singes rhésus (Macaca mulatta), 5 % des descendants sont issus de mâles satellites.
  • Chez les crapets arlequins (Lepomis macrochirus), les mâles satellites fertilisent 89 % des œufs relâchés par les femelles.
  • Les limules possèdent dix yeux.

Pour en savoir plus…