Le Centre de semences forestières de Berthier

Chaque année, quelque 130 millions de plants sont mis en terre afin de garantir le renouvellement des forêts privées et publiques de tout le territoire du Québec. Puisque les activités de reboisement assurent la pérennité de nos forêts, l’importance accordée à la production de semences de qualité est primordiale.

Afin de s’assurer que les plants produits par les pépiniéristes proviennent d’une semence de première qualité, de source contrôlée et génétiquement améliorée, le gouvernement du Québec confie au Centre de semences forestières de Berthier (CSFB) le mandat de traiter et d’expédier toutes les semences nécessaires aux pépinières forestières du Québec qui cultivent des plants destinés au reboisement.

Le traitement des semences forestières est complexe. En plus d’assurer la qualité génétique des semences par le contrôle des sources d’approvisionnement, des soins méticuleux aux diverses étapes de leur traitement sont apportés pour préserver leur qualité germinative, depuis leur extraction des cônes jusqu’à leur expédition pour l’ensemencement en pépinières.

Dans cette page :

 

Historique

Le reboisement au Québec a été abordé officiellement pour la première fois en 1882, mais la motivation à l’égard du reboisement n’était pas assez forte pour inciter à une telle activité les détenteurs de terrains incultes. La difficulté de se procurer des semis convenables pour la plantation et le manque d’informations sur les techniques de production de plants forestiers décourageaient toutes les bonnes intentions. Il faut attendre 1908 pour constater un nouvel effort avec l’établissement d’une pépinière gouvernementale à Berthierville. À cette époque, les semences étaient achetées et des essais de germination étaient réalisés à la pépinière. Vingt ans plus tard, en 1928, une première usine de traitement des semences est opérationnelle. Cette usine sera reconstruite en 1958 à la suite d’un incendie.

L’actuel CSFB a été inauguré en 1987. Ce complexe comprend une usine de traitement des semences forestières d’une capacité annuelle de 5 000 hectolitres de cônes, un séchoir à cônes et quatre chambres froides pour la conservation des semences.

Fort de l’expérience acquise depuis sa fondation, le Centre CSFB traite une quinzaine d’essences de résineux et autant d’essences de feuillus. Son personnel tire profit à la fois des technologies, découvertes et innovations tant québécoises, canadiennes, que suédoises ou américaines. L’expertise technique et scientifique du Centre lui permet de bénéficier d’une solide réputation à l’échelle internationale.

Les essences d’arbres résineux

L’extraction des semences

Après leur récolte, généralement à l’automne, les cônes de résineux sont acheminés dans un vaste entrepôt ventilé pour une période d’au moins huit semaines pour y effectuer un préséchage et y compléter le mûrissement de leurs semences (la postmaturation). Après cette période, les cônes sont transférés à l’usine et traités séparément, selon l’essence et l’origine.

L’extraction des semences de résineux consiste à introduire les cônes dans un des six tarares de l’usine pendant une durée qui est variable selon les essences, afin de faire ouvrir les cônes pour libérer les semences. Ces « sécheuses » sont essentiellement de gros tambours rotatifs d’une capacité de 10 hectolitres chacun dans lesquels sont culbutés les cônes dans une atmosphère contrôlée d’air chaud et humide, jusqu’à ce que les écailles ouvrent et laissent tomber les semences. Dépendamment de l’essence traitée, cette opération nécessite de 14 à 22 heures de rotation, interrompues par quelques périodes d’arrêt, à une température variant de 50 °C (épinette blanche) à 70 °C (épinette noire).

Sorties du tarare au fur et à mesure qu’elles sont extraites des cônes, les semences sont nettoyées et désailées, tandis que les cônes vides sont broyés et utilisés pour chauffer les bâtiments. Le nettoyage des semences débute par l’élimination des principales impuretés au moyen de tamis mécaniques. Les semences sont ensuite transférées dans un cylindre rotatif où elles sont aspergées d’eau. Le cylindre tournera pendant 15 à 60 minutes selon l’essence. En humectant la semence, l’eau fait gonfler l’aile qui se détache de la semence. La force centrifuge créée par la rotation jointe à un jet d’air comprimé permet d’éliminer des ailes et les semences vides. Les semences sont ensuite immergées dans un bassin d’eau pour les séparer des autres impuretés comme les particules de résine, plus denses que l’eau, qui se déposent au fond du réservoir. Comme les semences de résineux flottent, celles-ci remontent à la surface et sont dirigées vers trois chambres d’air chaud dont l’humidité relative est contrôlée à environ 35 %. À la sortie du séchoir, la teneur en eau des semences doit être inférieure à 10 % et l’activité de l’eau doit se situer autour de 0,35 (humidité relative d’équilibre de 35 %).

Quand les semences sont sèches et que l’activité de l’eau se situe près de 0,35, elles sont triées par grosseur et par poids pour séparer les semences vides des pleines. À la fin du processus d’extraction et de nettoyage, les lots de semences sont évalués selon plusieurs tests (voir « L’analyse de la qualité des semences de résineux et de feuillus » un peu plus loin) et entreposés dans l’une des chambres froides jusqu’au moment où ils seront expédiés aux pépinières forestières.

Teneur en eau

La teneur en eau des semences s’exprime par la masse d’eau qu’elles renferment, rapportée à l’unité de masse fraîche.

Activité de l’eau

La mesure de l’activité de l’eau est une image de l’intensité des connexions entre l’eau et les autres molécules. Il s’agit d’une analyse qualitative qui illustre le statut de l’énergie de l’eau et, par conséquent, son degré de disponibilité et sa mobilité dans les semences. L’activité de l’eau s’exprime sur une échelle de 0 à 1; un terme équivalent à l’activité de l’eau est l’humidité relative d’équilibre qui est notée de 0 à 100 %.

Les essences de feuillus

La formation des semences

Au printemps, le pollen des fleurs mâles féconde les fleurs femelles des arbres avoisinants. Au cours de l’été, les fleurs fécondées deviennent des fruits. Chez les feuillus, le nom du fruit varie selon l’espèce.

Espèce Nom du fruit
Bouleau Strobile
Cerisier Drupe
Noyer Noix
Chêne Gland
Érable, Orme Samare
Tilleul, Peuplier Capsule

Le traitement des semences

Le traitement appliqué aux semences de feuillus, en vue de leur conservation en chambre froide, dépend des essences ou du taux de déshydratation qu’elles peuvent supporter. Selon le cas, les semences sont extraites des fruits. Les bonnes semences sont sélectionnées, désailées ou séchées, conservées à l’intérieur de chambres froides et leur dormance est levée par la stratification avant leur expédition aux pépiniéristes.

L’analyse de la qualité des semences de résineux et de feuillus

La connaissance de la qualité des semences permet au pépiniériste de calculer la quantité qu’il devra ensemencer pour obtenir le nombre de plants voulu. Des échantillons représentatifs de chaque lot sont donc analysés afin d’en déterminer la teneur en eau, l’activité de l’eau, l’état des embryons à l’aide d’un test à la coupe ou d’une radiographie, la pureté, le nombre de semences au kilogramme ou au litre, le test de germination et, enfin, la valeur germinative.

Le test de germination et la valeur germinative

L’évaluation de la capacité germinative (test de germination) et de la valeur germinative est réalisée selon les règles internationales de l’ISTA (International Seed Testing Association / Association Internationale d’Essai de Semences). Ces paramètres permettent de caractériser la viabilité, le degré de dormance et la vigueur du lot de semences. Ces analyses sont effectuées en laboratoire afin de reproduire artificiellement tous les facteurs qui influencent la germination (température, humidité et éclairage) et sont réalisés en tout temps durant l’année.

La conservation des semences

La conservation des semences de résineux et de certaines essences de feuillus rend possible la constitution de réserves de semences à partir desquelles le Ministère approvisionne les pépiniéristes en tout temps.

Les semences qui peuvent supporter une certaine déshydratation sont rangées dans des contenants hermétiques et entreposées dans des chambres froides à -3 °C. Étant donné leur faible teneur en eau, elles peuvent se conserver plus de dix ans dans de telles conditions.

Quant à elles, les semences d’arbres feuillus qui ne supportent pas la déshydratation doivent être conservées à une température de 1 °C à 3 °C. Par ailleurs, soulignons que ces semences ne peuvent pas être conservées pendant de longues périodes sans perdre de leur viabilité.

La dormance et la technique de stratification

La dormance est un blocage qui empêche une semence de germer, et ce, même si elle bénéficie de conditions optimales de germination (température, humidité, lumière, pression). Ce phénomène naturel est beaucoup plus prononcé chez les feuillus que chez les conifères.

Pour lever la dormance des semences, augmenter leur taux de germination et en accélérer le processus, le personnel du CSFB a recours à une technique de « stratification en sac ». Chez les résineux, la période de stratification dure de 21 à 28 jours selon l’essence. Pour les feuillus, la période de stratification nécessite de 3 à 26 semaines selon l’essence.

La recherche et le développement

Comme les connaissances sur le traitement des semences s’améliorent constamment, le CSFB doit se tenir à la fine pointe de la recherche et du développement. Il travaille donc en étroite collaboration avec les chercheurs du Ministère et entretient des relations constantes avec ses homologues canadiens, américains et d’outre-mer.

À l’affût de tout avancement dans son secteur d’activité, particulièrement à l’occasion d’échanges internationaux, le personnel technique et opérationnel expérimente diverses méthodes de traitement des semences. Une équipe de développement a travaillé particulièrement durant les dernières années à améliorer les techniques d’extraction et de nettoyage des semences de même que les méthodes de conservation et de stratification. Ce travail a permis de hausser sensiblement le taux de germination de la majorité des essences après extraction, valeur qui se situe maintenant à 95 % et plus.

Certification ISO 9001

Depuis 2011, le Centre de semences forestière de Berthier est certifié selon la norme ISO 9001 et s’est doté depuis lors d’une Politique Qualité :

« Par l’amélioration continue de ses processus d’opération, le Centre de semences forestières de Berthier entend contribuer activement à la stratégie d’aménagement durable des forêts du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs en assurant la production de semences forestières de première qualité, selon les besoins des utilisateurs et au meilleur coût. »

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