Pleins feux sur… l’Halloween, la corneille et le corbeau
Nous avons l’habitude de croasser lorsque tu passes à proximité d’un arbre où nous nous tenons. Pour bien des gens, cela suffit à les mettre mal à l’aise, comme si nous parlions d’eux. Oiseaux de malheurs pour certains, messagers des dieux ou des morts pour d’autres, nous sommes entourés de mystère et bien mal connus. Poursuis ta lecture pour en savoir plus!
Ressemblances et différences
Nous faisons partie de la famille des corvidés. Au Québec, nous ne sommes que quatre espèces : la corneille d’Amérique (Corvus brachyrhynchos), le grand corbeau (Corvus corax), le geai bleu (Cyanocitta cristata) et le mésangeai du Canada (Perisoreus canadensis). Contrairement à ce que tout le monde croit, nous sommes deux espèces différentes : la corneille n’est pas ma femelle.
La corneille d’Amérique et moi, le grand corbeau, sommes noirs du bout du bec jusqu’au bout des griffes. Nos plumes ont même un léger reflet pourpre. Je mesure de 54 à 72 cm alors que la corneille mesure de 43 à 53 cm. Pour nous différencier facilement, il suffit d’attendre qu’on s’envole et d’observer notre queue. La mienne a une forme de pointe de losange alors que celle de la corneille est en forme d’éventail. Au repos, je possède de longues plumes ébouriffées sur la gorge et de petites plumes couvrent mes narines. La corneille n’a pas ce plumage particulier. Mon bec est également plus gros par rapport à la taille de ma tête que celui de la corneille.
Nous sommes des oiseaux omnivores, c’est-à-dire qu’on mange de tout. Nous sommes également de grands opportunistes. On se nourrit d’insectes, de larves, de vers, de fruits et de graines. On se nourrit également de grenouilles, de souris et de jeunes lièvres lorsqu’on peut mettre la patte dessus. Nous sommes friands d’œufs et d’oisillons. Pour les subtiliser aux parents qui couvent, on travaille en équipe : un d’entre nous fait diversion pendant que les autres attaquent le nid. On se délecte également des détritus que vous produisez et des carcasses des animaux victimes de la route. À l’automne, on se fait des ennemis des producteurs de maïs : on ouvre les épis pour manger quelques graines et on laisse le reste aux insectes et aux champignons.
Des oiseaux avec des valeurs familiales
Lorsque nous formons un couple avec un partenaire de notre espèce, nous sommes unis pour la vie. Le nid de la corneille, comme le mien, est construit à une hauteur de 7 à 12 m, au niveau d’une fourche dans un conifère ou dans une falaise, sous un affleurement rocheux. Nous pouvons revenir au même nid année après année, mais puisque nous possédons deux ou trois sites potentiels, on peut se permettre une rotation de temps à autre. Le nid est fait de branches que nous arrachons directement des conifères, et l’intérieur est une dépression tapissée de lambeaux d’écorce, de mousse et d’herbe.
Vers le début d’avril, la femelle pond de 5 à 7 œufs qu’elle couve pendant une vingtaine de jours. Au cours de cette période, elle est nourrie comme un bébé par le mâle. Les jeunes sont nourris par les parents et par les juvéniles de l’année précédente, qui ne sont pas encore matures sexuellement et qui peuvent demeurer avec leurs parents. Ces cellules familiales atteignent parfois jusqu’à dix individus! Les jeunes apprennent à voler cinq semaines après leur éclosion et nous nous réunissons en grandes volées pour le reste de l’été.
Légendes et superstitions
Dans la mythologie, la distinction n’est pas souvent faite entre la corneille et moi. C’est comme si nous étions de la même espèce. Nous sommes principalement considérés comme des présages de mort. Cette association vient du fait que nous nous nourrissons de charogne et que, dans le passé, nous visitions les gibets lorsqu’il y avait des exécutions pour manger les corps. Comme tu le sais, nous jacassons beaucoup et le dieu de la mythologie nordique Odin nous utilisait pour recueillir des nouvelles partout dans le monde et les lui rapporter. C’est pourquoi nous étions considérés comme des espions et que les humains évitaient de parler de quoi que ce soit d’important devant nous.
Dans la mythologie grecque, nous sommes associés aux nuages et à la pluie. Selon la mythologie romaine, nous sommes les oiseaux sacrés d’Apollon et nous serions les protecteurs des oracles et les maîtres des voyants. Selon le christianisme, notre rôle alterne entre être les protecteurs des prophètes et être les oiseaux du diable. Apparemment, nous abritons l’âme de prêtres déchus. Autrefois, nous aurions été blancs comme neige. Le noir de nos plumes serait une punition reçue pour avoir mangé les victimes du grand déluge prédit par Noé.
Sur une note plus positive, les Celtes nous considéraient comme des protecteurs. Cette croyance tient toujours et c’est pourquoi six corbeaux sont logés en permanence dans la tour de Londres, aux frais de la couronne britannique. Le maître des corbeaux est le seul qui puisse s’en occuper et les approcher. Il est dit que si les corbeaux venaient à quitter la tour, la Grande-Bretagne serait perdue aux mains d’un envahisseur. J’ai un peu de pression sur les épaules pour être franc!
Selon des légendes provenant des Premières Nations, le monde était à l’origine sans lumière. J’aurais découvert qu’un vieil homme vivant avec sa fille gardait toute la lumière. Après m’être introduit dans la maisonnée sous la forme d’un bébé et avoir passé quelques années avec ma famille adoptive, je serais parvenu à voler la lumière du vieil homme et à la donner à tous. Transportant le soleil dans ma bouche, je me serais couvert de suie et c’est pourquoi je suis noir.
Une intelligence surprenante
Dans tous les cas, la source de ces mythes et croyances est notre incroyable intelligence. Ce n’est certainement pas de nous qu’on parle dans l’expression « avoir une cervelle d’oiseau ». Il nous arrive de nous nourrir de noix, mais notre bec n’est pas assez puissant pour craquer la coquille. Il nous suffit de lâcher la noix du haut des airs pour qu’elle s’écrase sur une surface dure. Au Japon, nous avons appris à laisser les noix sur la chaussée et à attendre qu’une voiture roule dessus pour l’ouvrir. Nous sommes reconnus pour être en mesure de résoudre des problèmes auxquels nous n’avons jamais eu à faire face. Par exemple, un chercheur a installé de la nourriture au bout d’une ficelle qui est attachée à une branche. Sans jamais avoir été dans cette situation, il nous faut peu de temps pour comprendre qu’il faut tirer sur la corde puis la bloquer avec notre patte pour atteindre la nourriture. Oh hisse! Oh hisse! Selon une étude faite à l’Université de Washington à Seattle, il semblerait que nous soyons en mesure de distinguer un humain d’un autre en se basant uniquement sur la structure de leur visage. Et vous avez de la difficulté à me différencier de la corneille?
Crois-moi, les scientifiques ne font que commencer à être surpris… j’ai encore bien des tours dans mon sac!
Il paraît que…
- Joshua Klein, hôte de l’émission « The Link » sur le National Geographic channel, a lancé l’idée d’utiliser les corneilles et les corbeaux pour ramasser les ordures délaissées dans les endroits publics. La méthode? Une machine qui, lorsqu’un objet est déposé dans une fente, remet automatiquement des arachides. Jusqu’à maintenant, les tests menés avec des pièces de monnaie sont concluants.
- Comme les perroquets, les corneilles et les corbeaux peuvent apprendre quelques mots du langage humain.
- Comme les oiseaux de proie, les corbeaux et les corneilles régurgitent des boulettes de poils et d’os qu’ils ne peuvent digérer.
Jeu
Pour en savoir plus…
Zoo Ecomuséum
Cornell Lab of Ornithology