Les mineuses
Biologie et comportement
Certaines larves des lépidoptères, des hyménoptères, des coléoptères et des diptères dévorent le parenchyme des feuilles et creusent de véritables galeries entre leurs épidermes. Quelques espèces s’alimentent ainsi pendant la majeure partie de leur vie larvaire; leurs galeries revêtent donc un aspect très particulier (photo 1). Par contre, d’autres larves se libèrent de ces galeries d’alimentation pour continuer d’exercer leur ravages à la surface des feuilles (photo 2). Les larves qui vivent dans le parenchyme des feuilles ne posent généralement aucun problème, car les dégâts qu’elles causent ont moins d’impact comparativement à ceux attribuables aux grands défoliateurs.
Les mineuses les plus abondantes appartiennent à quatre familles de lépidoptères. Néanmoins, ce sont celles de la famille des gracillariidés qui sont, de loin, les plus répandues et qui causent les dégâts les plus spectaculaires (photos 3 et 4). Les espèces les plus courantes appartiennent aux genres Cameraria (photo 5), Phyllonorycter (photo 6) et Phyllocnistis (photo 7). Les larves de ces mineuses sont minuscules et leur longueur ne dépasse guère 6 mm. Leur corps aplati et fortement segmenté est d’un blanc jaunâtre. Ces larves ont une tête et un prothorax bien développés, mais elles sont souvent dépourvues de pattes et se déplacent par reptation dans leurs galeries (photo 8).
Les mineuses déposent leurs œufs dans de minuscules pochettes individuelles pratiquées dans l’épiderme des feuilles, près des nervures (photo 9). Les larves se nourrissent d’abord de sève, puis, au cours de leurs deux derniers stades de développement, des tissus des feuilles. Elles se transforment ensuite en petits papillons qui mesurent rarement plus de 6 mm de longueur. Leurs ailes brillamment colorées sont finement dentelées et leurs antennes sont au moins aussi longues que leurs ailes antérieures (photo 10).
Les trois autres familles de lépidoptères les plus répandues sont, en ordre décroissant, les yponomeutidés, dont trois espèces s’attaquent au cèdre (photo 11), les tortricidés, qui s’en prennent aux épinettes (photo 12), et les géléchiidés, qui ravagent les pins (photo 13) et le cèdre (photo 14).
Toutes les mineuses qui appartiennent à l’ordre des hyménoptères font partie de la famille des tenthredinidés. Les plus connues sont les mineuses du bouleau et celle de l’orme. Introduite en Amérique du Nord en 1923, la petite mineuse du bouleau, Fenusa pusilla (Lep), s’est vite répandue dans tout le Québec où elle est devenue un ravageur important de toutes les espèces de bouleau (photos 15 et 16). Trois autres insectes exotiques, la grande mineuse du bouleau, Heterarthrus nemoratus (Fall.), la tenthrède-mineuse de Thomson, Profenusa thomsoni (Konow), et la tenthrède-mineuse du bouleau, Messa nana (Klug), s’attaquent aussi fréquemment à ces mêmes arbres (photos 17, 18 et 19). Leurs larves s’installent habituellement entre deux nervures importantes et elles minent les feuilles (photo 20).
L’orcheste du saule, Isochnus rufipes (LeC.). est sans doute la mineuse la plus gênante de l’ordre des coléoptères. Les larves de ce petit charançon noir, qui mesure environ 2 mm de longueur, minent les feuilles et y provoquent l’apparition de petites taches d’abord isolées, mais qui finissent par se rejoindre. En août et en septembre, tout le feuillage devient brunâtre (photos 21, 22, 23 et 24). Soulignons enfin qu’on trouve parfois quelques larves de chrysomèles dans les feuilles des peupliers et du tilleul (photos 25, 26 et 27).
Chez les diptères, ce sont surtout les insectes de la famille des agromyzidés qui provoquent des dégâts. Ils s’en prennent aux feuilles des peupliers et de l’orme (photos 1 et 28). On les reconnaît facilement à cause de la forme caractéristiques de leurs mines (photo 1).[/one_half_last]
Hôtes
Les bouleaux et les peupliers sont les hôtes de prédilection des mineuses, particulièrement des mineuses des feuilles, mais ces insectes affectionnent aussi les ormes, les érables, les chênes et les saules.
Détection
Des taches pâles ou foncées sur la face supérieure ou inférieure des feuilles révèlent souvent la présence de mineuses. Pendant la phase où les insectes sont très actifs, la cime des arbres passe soudainement au rouille, puis au brun très foncé (photo 29).
Par ailleurs, l’aspect des galeries, qui peuvent être étroites, sinueuses, ovoïdes ou de formes diverses, varie selon les groupes et même les espèces de mineuses. Il suffit donc souvent pour identifier les insectes.
Dégâts
Les insectes défoliateurs provoquent chez leurs hôtes un stress physiologique proportionnel à l’importance de leurs attaques. Quand plusieurs mineuses s’alimentent de la même feuille, elles la vident rapidement de son contenu pour la réduire à ses deux épidermes. La feuille sèche, brunit et tombe prématurément. Une partie importante de l’arbre peut être ainsi dénudée. Or, cette perte de feuillage ou la destruction du parenchyme des feuilles réduit considérablement le pouvoir phytosynthétique des arbres d’ornementation. Leur croissance en est affectée et leur vitalité réduite. Si les attaques se répètent, l’arbre affaibli peut être envahi par d’autres insectes ou par des champignons pathogènes.
Dans les forêts naturelles, quelques espèces de mineuses prolifèrent parfois de façon notable. Elles envahissent de vastes secteurs de forêts à dominance de peupliers (photo 3) et de cèdres (photo 30). C’est le cas, notamment, de la petite mineuse du bouleau qui, au cours des cinquante dernières années, a envahi toutes les régions du Québec où poussent des bouleaux. Cependant, même si cet insecte n’est pas indigène à l’Amérique du Nord, une trentaine de parasites et une quinzaine de prédateurs, y compris des oiseaux, des fourmis et des guêpes, s’attaquent à lui.
Lutte
La lutte contre les mineuses est extrêmement difficile, puisque leurs larves sont dissimulées entre les deux épidermes des feuilles et qu’elles sont ainsi relativement bien protégées contre les insecticides chimiques. Seuls les insecticides endothérapiques ou systémiques sont efficaces, dans certaines conditions. Néanmoins, une fertilisation automnale adéquate permet aux arbres, même gravement atteints, de se rétablir rapidement, pour ensuite se développer pleinement.
A Parenchyme : tissu cellulaire spongieux et mou des feuilles.