Chapitre V – Chemins, sablières et infrastructures forestières
Section III – Ponts, ponceaux, ouvrages amovibles et ouvrages rudimentaires
§4. Dispositions générales applicables aux ponts ou aux ponceaux
Article 103
Lors de la construction, de l’amélioration ou de la réfection d’un chemin qui traverse un cours d’eau, un ponceau doit être aménagé de manière à assurer le libre passage du poisson, sauf si, à moins de 250 m en amont ou de 500 m en aval du site de traversée, l’une ou l’autre des situations suivantes se présente :
- il y a présence d’une chute verticale d’une hauteur de plus de 1 m, mesurée à partir de la surface de l’eau, et aucune frayère identifiée sur le terrain ou indiquée dans les couches d’informations numériques servant à la planification forestière n’est présente entre la chute et le site de traversée;
- le lit du cours d’eau présente une section de roche-mère lisse dont la pente moyenne est de 5 % ou plus sur une distance minimale de 3 m et où la profondeur d’eau s’écoulant sur l’ensemble de cette section est de moins de 100 mm;
- une section du cours d’eau présente une pente égale ou supérieure à 20 %, évaluée à l’aide de cartes topographiques du ministère ou observée sur le terrain sur une distance de plus de 20 m.
Un ponceau n’a pas non plus à être aménagé de manière à assurer le libre passage du poisson si, à moins de 250 m en amont du site de traversée, le lit du cours d’eau disparaît sur une distance de plus de 5 m.
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Informations complémentaires
Il est acceptable de ne pas assurer le libre passage du poisson si, à moins de 500 m de l’aval du site de traversée, le lit du cours d’eau (cartographié ou non) disparaît sur une distance de plus de 5 m, car il s’agit d’un obstacle au libre passage du poisson.
Il est acceptable de ne pas assurer le libre passage du poisson des cours d’eau tributaires en amont d’un lac sans poissons reconnus par le MFFP (site faunique d’intérêt particulier (SFI) reconnu par le MFFP).
Si plus d’un des critères terrain prévus à l’article 103 sont rencontrés très près des seuils limites identifiés, par exemple une disparition du lit du cours d’eau sur une distance de 4 m et une pente de 20 % sur une distance de 18 m, une demande doit être déposée en utilisant le Formulaire de demande d’autorisation relative à l’article 41 de la Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier pour la construction ou l’amélioration d’un chemin multiusage dans les forêts du domaine de l’État (articles 92, 106 et 108) (remplir en fonction de l’article 106) disponible auprès de l’unité de gestion responsable . Une évaluation sera alors effectuée afin de déterminer s’il faut assurer le libre passage du poisson. S’il s’avère qu’il n’est pas requis d’assurer la libre circulation du poisson à ce site, une autorisation en ce sens sera délivrée.
Les paragraphes 1 et 2 du premier alinéa ne s’appliquent pas à un cours d’eau fréquenté par le saumon atlantique, la ouananiche, l’omble chevalier de la sous-espèce oquassa et l’omble de fontaine anadrome.
Pour l’application du présent article, les barrages de castor, les débris ligneux et les obstacles d’origine anthropique sont réputés ne pas être des obstacles au passage du poisson.
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Informations complémentaires
Lors de l’aménagement des ponts et des ponceaux sur un tronçon de cours d’eau où la libre circulation du poisson doit être assurée, on doit faire en sorte que ces ouvrages ne deviendront pas des obstacles pour celui-ci (ex. : la profondeur de l’eau peut être insuffisante, la vitesse d’écoulement à l’intérieur du ponceau, excessive, ou une chute peut s’être formée à la sortie de celui-ci). Le respect des normes édictées dans les articles 103, 105, 106, 108 et 110 et des conditions présentées aux annexes 9 à 12 permet d’éviter ces situations. L’arbre décisionnel ci-dessous aide à déterminer le type d’ouvrage à installer pour traverser un cours d’eau.
Pourquoi assurer la libre circulation du poisson dans les cours d’eau?1
Les poissons se déplacent tout au long de leur vie pour accéder à des habitats de qualité afin de se nourrir, de se reproduire et de s’abriter. Il est essentiel que le poisson puisse circuler librement pour satisfaire ses besoins vitaux. S’il ne peut se nourrir adéquatement, il sera en moins bonne condition, ce qui pourrait retarder sa croissance, réduire son succès reproducteur ou en faire une proie plus facile pour ses prédateurs. En période de reproduction, la présence d’obstacles sur le parcours des géniteurs peut retarder leur arrivée sur les sites de fraie ou les empêcher d’atteindre les meilleurs sites, les privant ainsi des conditions favorables à l’incubation de leurs œufs et à la survie des jeunes.
Sur un même bassin versant, la multiplication d’ouvrages limitant la circulation du poisson vers l’amont entraînerait une fragmentation de son habitat. Cette entrave à la libre circulation du poisson pourrait également diminuer le succès de pêche et avoir des impacts socioéconomiques importants liés à l’exploitation de la ressource.
Sur des portions d’un cours d’eau naturel, les déplacements du poisson peuvent, en certaines circonstances, être limités. C’est pourquoi il n’est pas nécessaire d’assurer sa libre circulation partout et en tout temps. Par exemple, s’il y a un obstacle naturel permanent, comme une forte chute ou une pente abrupte sur le site de franchissement du cours d’eau ou à proximité, ou si l’habitat en amont de l’ouvrage projeté est marginal, c’est-à-dire petit et de piètre qualité. Ou encore lorsque les conditions hydrauliques sont défavorables. En effet, le poisson ne remonte pas vers l’amont du cours d’eau durant ces périodes. En revanche, pendant les périodes où les conditions hydrauliques sont favorables à la migration des espèces présentes dans le cours d’eau, leur circulation dans les ouvrages doit absolument être assurée.
Le respect des normes édictées dans les articles 103, 105, 106, 108 et 110 et des conditions présentées dans les annexes 9 à 12 permet d’éviter que les ouvrages constituent des entraves à la libre circulation du poisson.
Les ouvrages qui permettent d’assurer la libre circulation du poisson
Les ponts
L’ouvrage le plus efficace pour assurer la libre circulation du poisson est le pont, et en particulier le pont à portée libre, dont toutes les composantes enjambent le cours d’eau sans en modifier le lit ou les berges. Les ponts permettent de maintenir les conditions naturelles d’écoulement, en conservant les caractéristiques du lit du cours d’eau, soit le substrat, la pente et la largeur. En raison de l’absence de remblai, le pont chevauche un plus court tronçon du cours d’eau que les ponceaux.
Les ponceaux comportant une arche
Les ponceaux comportant une arche, et en particulier ceux dont l’ensemble des travaux est exécuté en dehors des berges, sont également très efficaces pour assurer la libre circulation du poisson, dans la mesure où les caractéristiques du cours d’eau naturel sont conservées ou reconstituées. Dans ces contextes, le poisson rencontrera des conditions hydrauliques semblables aux conditions naturelles pendant les périodes où il doit se déplacer.
Les ponceaux comportant un conduit
Les ponceaux comportant un conduit peuvent également assurer la libre circulation du poisson si leur conception et leur installation sont adéquates.
- D’une part, les ponceaux permettent d’assurer la libre circulation du poisson si le conduit est suffisamment enfoui pour que l’eau soit refoulée vers l’amont à l’aide d’un seuil situé en aval dans le cours d’eau. Le refoulement permet d’augmenter le niveau de l’eau et de diminuer la vitesse dans le conduit. Ces conditions hydrauliques peuvent être créées seulement dans des cours d’eau ayant une faible pente.
- D’autre part, les ponceaux comportant un conduit muni de déversoirs permettent d’assurer la libre circulation du poisson dans les cours d’eau dont la pente est plus abrupte. Des déversoirs sont installés à intervalles réguliers dans le conduit pour créer une succession de seuils et de bassins qui permettent d’augmenter le niveau de l’eau dans le conduit et de réduire sa vitesse. L’eau est refoulée vers le premier déversoir en aval du ponceau par un seuil situé en aval dans le cours d’eau.
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¹ Auteurs : Collaboration du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs et de Pêches et Océans Canada
Modalités particulières applicables lors de certains travaux
Amélioration ou réfection d’un tronçon de chemin qui traverse un cours d’eau
Lors de l’amélioration ou de la réfection d’un tronçon de chemin qui traverse un cours d’eau, il n’est pas requis d’aménager un nouvel ouvrage si le conduit du ponceau est en bon état (c’est-à-dire si l’ouvrage est stable et permet la circulation de l’eau). Par contre, lorsque les travaux se rapportent au conduit à proprement parler (par exemple à son allongement en raison de l’élargissement du chemin ou à son remplacement), l’ouvrage devra permettre la libre circulation du poisson après les travaux à moins que l’une ou l’autre des situations prévues à l’article 103 se présente.
Aménagement d’un ponceau pour franchir l’émissaire ou le tributaire d’un lac comportant une occurrence d’omble chevalier de la sous-espèce oquassa
L’omble chevalier de la sous-espèce oquassa est un poisson d’eau douce que l’on trouve au Québec au sud du 52e parallèle. Il fait partie de la liste des espèces fauniques susceptibles d’être désignées comme menacées ou vulnérables. Le Centre de données sur le patrimoine naturel du Québec (CDPNQ) définit les limites d’une occurrence d’omble chevalier oquassa comme étant la superficie d’un lac où on a observé ou capturé un individu, ou d’un lac où on a observé une frayère. En effet, ce poisson se rencontre généralement dans les lacs oligotrophes (c’est-à-dire, pauvres en matières nutritives), profonds, aux eaux froides, transparentes et bien oxygénées. Ce poisson effectue en général son cycle de vie à l’intérieur des lacs. Il fréquente donc très peu les cours d’eau.
Dans ce contexte, il n’est pas requis qu’un ponceau servant à franchir l’émissaire ou le tributaire d’un lac comportant une occurrence d’omble chevalier oquassa soit aménagé de manière à assurer la libre circulation de cette espèce si l’une ou l’autre des situations décrites à l’article 103 se présente à moins de 250 m en amont ou de 500 m en aval du site de traversée, ce qui inclut les situations suivantes :
1° il y a une chute de plus d’un mètre de hauteur à partir de la surface de l’eau et aucune frayère, identifiée sur le terrain ou indiquée dans les couches d’informations numériques servant à la planification forestière, n’est située entre la chute et le site de traversée;
2° le lit du cours d’eau comporte une section de roche-mère lisse dont la pente moyenne est de cinq pour cent ou plus sur une distance minimale de trois mètres et où la profondeur d’eau s’écoulant sur l’ensemble de cette section est de moins de 100 mm.
Il va sans dire que l’article 103 s’applique intégralement aux autres espèces de poissons. Par conséquent, l’exigence d’assurer le libre passage du poisson lors de l’aménagement d’un ponceau doit être déterminée selon les situations décrites dans cet article.
Aménagement d’un ponceau pour franchir un cours d’eau d’une largeur de 600 mm et moins
La méthode rationnelle prescrite à l’annexe 6 permet d’établir le débit maximum instantané d’une récurrence de 10 ans (Q10) au point de traversée du cours d’eau pour les bassins versants d’une superficie égale ou inférieure à 60 km². Cette méthode repose sur plusieurs hypothèses, ce qui fait qu’elle peut être moins bien adaptée pour certains bassins. En effet, des différences parfois importantes peuvent être observées entre les débits de pointe calculés et les débits relevés dans de petits cours d’eau associés à de petits bassins versants.
Dans ce contexte, les modalités suivantes doivent être appliquées pour les cours d’eau d’une largeur de 600 mm et moins, cartographiés ou non :
- Le ponceau n’a pas à être aménagé de manière à assurer le libre passage du poisson. Il n’est donc pas requis de vérifier la présence des situations décrites dans le premier et le deuxième alinéa de l’article 103.
- Le ponceau doit être aménagé en respectant les conditions suivantes :
- le diamètre du conduit ou la portée de l’arche doit être d’au moins 450 mm;
- le conduit doit être installé en suivant la pente naturelle du cours d’eau et être enfoui sous le lit du cours d’eau à une profondeur équivalant à 10 % de son diamètre, sans toutefois excéder 500 mm, peu importe sa taille;
- le ponceau peut comporter un conduit à paroi lisse ou deux dans le cas de conduits parallèles.
- Lorsque le diamètre du conduit déterminé en fonction du débit de pointe calculé est supérieur à la largeur du cours d’eau, le conduit mis en place doit appartenir à la classe de diamètre la plus près de la largeur moyenne du cours d’eau. Le conduit ne doit en aucun cas avoir pour effet d’en réduire la largeur de plus de 20 %, mesurée au niveau de la limite supérieure des berges.
- Lorsque le diamètre du conduit déterminé en fonction du débit de pointe calculé est inférieur à la largeur du cours d’eau, le conduit mis en place ne peut réduire la largeur du cours d’eau de plus de 50 %, mesurée au niveau de la limite supérieure des berges.
Il est acceptable de ne pas faire le calcul du débit de pointe du cours d’eau avant d’aménager le ponceau à la condition que le conduit mis en place se situe dans la classe de diamètre la plus près de la largeur moyenne du cours d’eau. Le conduit ne doit en aucun cas avoir pour effet d’en réduire la largeur de plus de 20 %, mesurée au niveau de la limite supérieure des berges. Si, en vertu de l’article 101, le ministre demande le calcul du débit de pointe du cours d’eau, la raison qui a guidé le choix de ne pas faire ce calcul préalablement aux travaux doit lui être fournie dans un délai de 48 heures.
Comment mesurer la largeur d’un cours d’eau?
La largeur d’un cours d’eau est déterminée à partir de la moyenne d’au moins quatre mesures représentatives du cours d’eau naturel prises en amont et en aval du site de traversée. Si des signes de rétrécissement ou d’élargissement sont présents, on doit exclure cette section (ex. : zone perturbée par un barrage de castors). La largeur est mesurée au niveau de la limite supérieure des berges. La façon de déterminer cette limite est indiquée dans la définition de berge.